Argentine : le point d’interrogation Lionel Messi

Il n’a fallu que quelques minutes, après le coup de sifflet final à Santiago Bernabéu, pour que le débat enflamme toutes les chaînes sportives argentines : quel avenir pour Messi à Paris, a-t-il bien fait d’aller en France et doit-il déjà partir ? Sept mois après l’arrivée de la Pulgadans l’Hexagone, un constat semble désormais faire l’unanimité sur les bords du Rio de la Plata : Messi et le PSG, ça ne matche pas vraiment. Ultra-protecteurs avec le capitaine de l’Albicelestedepuis la victoire en Copa América l’été dernier, les médias argentins se refusaient jusqu’à présent à entendre les critiques françaises autour du niveau de jeu du numéro 30 parisien. La déroute madrilène a peut-être changé la donne, et entraîné une petite prise de conscience.

Après s’être indigné pendant deux semaines contre le 3 infligé au héros national à la suite du match aller contre le Real Madrid, le quotidien sportif Olés’étonnait ainsi de l’indulgence de L’Équipe au retour. Messi, noté 6 ? « On lui a mis 4 parce qu’on a trouvé que dans le moment décisif du match et quand il fallait avoir la tête froide, Leo n’est pas apparu, justifie Demián Meltzer, journaliste au seul canard argentin consacré au sport.La rencontre ne se perd pas à cause de lui, mais comme Mbappé ou Neymar, il n’a pas collaboré dans le final pour aider l’équipe à s’en sortir. »

Comment gérer sa fatigue, ses moments faibles ?

Dans les journaux, les statistiques du natif de Rosario commencent à être analysées comme étant préoccupantes. Messi y est parfois décrit comme « loin de son niveau footballistique », ce que personne n’osait vraiment dire il y a encore quelques jours en Argentine. Le fait est que, depuis ses dix-sept ans, l’ancien joueur du Barça n’avait jamais été aussi peu efficace en championnat. Figure du coaching, Ángel Cappa (un des maestros argentins de Guardiola) tentait d’apporter une explication sur les ondes de Radio Colonia ce jeudi : « Messi ne peut pas être à l’aise dans ce PSG parce que c’est une équipe qui ne joue pas, qui n’a pas le ballon. Il y a quelques années, il pouvait résoudre les problèmes tout seul. À 36 ans, il ne peut plus faire ça. Il a besoin d’une équipe avec un jeu en place, comme la sélection argentine. »

Une image a, aussi, marqué les esprits. Celle du septuple Ballon d’or avec le regard perdu, la tête baissée et les mains sur les hanches après la défaite au Bernabéu. « Comme lorsqu’il était excessivement critiqué avec la sélection », notait le journal La Nación, ce vendredi. Si ce rappel à un passé pénible a permis à quelques « Anti-Messi » de sortir du placard où ils étaient enfermés depuis la Copa América, il a aussi provoqué une réaction immédiate de ses nombreux et plus fervents défenseurs. Comme l’édito très remarqué de Pablo Giralt, le commentateur de l’Albiceleste, adressé directement à l’idole : « Leo, tu ne peux pas avoir oublié de marquer des buts. La saison dernière, tu étais encore le meilleur dans un Barça en décadence. Ce Messi, je ne le veux pas. Tu es trop grand pour jouer pour les autres, tu dois être le protagoniste et pas le second rôle. Sors de là, Leo. Pars ailleurs, nous voulons te voir dans une autre version. »

« Osef » du PSG ?

Si la question de l’avenir de la Pulgaau PSG se pose plus ou moins sérieusement ces derniers jours, cette sortie théâtrale témoigne en réalité de la seule et véritable préoccupation que pourraient avoir les Argentins. À Paris, Messi va-t-il bien pouvoir préparer sa dernière Coupe du monde ? Lui espérait y retrouver le haut niveau et gagner une nouvelle Ligue des champions, après ses déroutes catalanes… Raté. Les matchs de Ligue 1 restant à disputer cette saison ne suscitent, logiquement, aucun enthousiasme dans son pays. « Le championnat ne suffira pas à assouvir sa soif de compétition, et à préparer son Mondial, veut croire le journal Clarín. Scaloni doit avoir entendu un signal d’alerte, il est indispensable que le sélectionneur fasse une analyse globale de la saison de Messi au PSG et il paraît difficile que Leo puisse jouer toutes les minutes au Qatar. »

Si cette inquiétude ne s’est pas encore propagée, c’est parce que le natif de Rosario semble désormais retrouver son plein potentiel et son sourire à chaque fois qu’il retrouve sa sélection. À l’inverse de ses années catalanes où ses allers-retours au pays ressemblaient parfois à des chemins de croix, et au plus grand bonheur des Argentins. « C’est pour cette raison que d’une certaine façon, ça nous intéresse moins qu’il soit bon avec le Barça ou Paris. Avec la sélection, il est heureux et accompagné. Vainqueur de la Copa América, et déjà qualifié pour le Qatar. Tout ce qu’on veut, c’est qu’il gagne la Coupe du monde, estime Demián Meltzer, d’Olé. On sait ce qu’il est capable de faire. S’il vient ici, marque trois buts à chaque match et que l’équipe continue de fonctionner, on ne va pas se préoccuper pour lui. » Lionel Scaloni observera tout de même avec attention les deux matchs de l’Albiceleste face au Venezuela le 25 mars à la Bombonera et contre l’Équateur quatre jours plus tard à Guayaquil pour savoir si son capitaine souffre, ou pas, de maux parisiens.