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Antoine Griezmann, déjà lancé
Quelques semaines seulement après son arrivée, Antoine Griezmann est dans une situation ambiguë : critiqué pour des performances apparemment en berne et soupçonné d'être rejeté par le vestiaire du Barça, le numéro 17 catalan est pourtant l'un des joueurs les plus décisifs de Liga et est loué par ses coéquipiers. Alors, où se situe vraiment la vérité ?
La statistique est tombée ce week-end et a été accueillie presque avec surprise : en Liga cette saison, aucun joueur n’a été plus décisif qu’Antoine Griezmann, déjà auteur de quatre buts et trois passes décisives en huit matchs. Pourtant, c’est peu dire qu’un climat irrationnel de remise en cause permanente s’est installé à l’égard de l’ancien joueur de l’Atlético de Madrid, scruté et soupçonné de crouler sous les problèmes : tandis que le vestiaire de l’institution catalane ne voudrait pas de celui qu’il a pu considérer comme l’un de ses plus féroces rivaux, Grizou ne trouverait pas non plus sa place sur le terrain. Une image, celle d’un Antoine Griezmann recalé au bout du vestiaire barcelonais après avoir été remplacé lors d’un match de pré-saison face à Arsenal, résumerait parfaitement la situation. Entre la statistique et la vidéo, un antagonisme de symboles, pour l’un trop beau, pour l’autre trop catastrophiste, masque la réalité des faits : l’adaptation de Griezmann au FC Barcelone se fait dans les règles de l’art, sans anicroches, progressivement, et surtout, avec succès.
« Il aime le maté, le reggaeton, un vrai Latino ! »
Dans la tourmente, Antoine Griezmann, comme à son habitude, a laissé parler et est resté fidèle à lui-même : plutôt discret et bienveillant quand on le dit tapageur, décalé et sincère quand on le veut limité, le champion du monde n’a fait qu’énoncer des vérités. À sa façon certes, c’est-à-dire avec un ton qui détonne dans le monde policé du football moderne, mais bien loin de la détresse que l’on a bien voulu lui prêter. En évoquant le 1er octobre, à la veille d’une victoire face à l’Inter (2-1), sa relation jusqu’alors limitée avec Lionel Messi, Antoine Griezmann n’a fait que décrire la problématique de tout joueur arrivant dans le vestiaire du Barça, là où la présence imposante et difficile d’accès de la Pulga fait autorité. « Il y a une période d’adaptation, car Messi a un concept d’amitié très fermé, a d’ailleurs affirmé le vice-président du FC Barcelone, Jordi Cardoner, au micro de Catalunya Radio début octobre.Griezmann transmet une grande honnêteté et finira par s’entendre avec lui. » En d’autres termes, aucun signal alarmant dans les mots prononcés par Griezmann, simplement la confidence honnête d’un joueur dont la discrétion avouée rencontre la difficulté d’accès d’un vestiaire ancien et cohérent.
De fait, aucun membre du vestiaire barcelonais n’a eu à se plaindre de l’arrivée d’Antoine Griezmann. Bien au contraire, tous ceux qui ont été interrogés à son sujet ont loué le comportement du joueur français, tant dans le vestiaire que sur le terrain, alors qu’un silence ou une réponse langue de bois auraient largement pu suffire. « Il nous aide beaucoup par son talent, par son effort défensif, car c’est un joueur qui se sacrifie énormément pour l’équipe, a déclaré Clément Lenglet en conférence de presse lors de son passage à Clairefontaine. Il n’y a pas de cas Antoine Griezmann. » « Il court tout le temps, revient pour défendre, il ne lâche rien, a ajouté Arturo Vidal, pourtant peu avare de punchlines, dans une interview accordée à L’Équipe. C’est une magnifique plus-value pour le Barça. Et il aime le maté, le reggaeton, un vrai Latino ! » Quant au soi-disant principal opposant de Grizou, Lionel Messi lui-même est intervenu. « C’est un mensonge de dire que je ne voulais pas de Griezmann, a-t-il confié au micro de RAC1. Les meilleurs sont toujours les bienvenus et il en est un : il n’y a aucun inconvénient à le voir venir, au contraire. »
En rodage peut-être, mais déjà en mode patron
Sur le terrain et loin des micros, là où les performances de Griezmann sont finalement les plus importantes, il est vrai que l’adaptation a pu être difficile lors des premiers matchs disputés sous le maillot blaugrana et que quelques erreurs et incompréhensions ont pu poindre dans le jeu du joueur français. De fait, au sein d’une équipe à l’identité tactique si prononcée, et si différente de celle de l’Atlético de Madrid, le rôle de la plus grosse tignasse de Liga a changé : bien moins libre que sous les ordres de Diego Simeone, avec qui il occupait une position axiale, le numéro 17 catalan est cantonné à l’aile gauche du dispositif barcelonais et doit obéir à une discipline de placement plus forte qu’auparavant. Ses responsabilités sont également moindres puisqu’il partage désormais la tête d’affiche avec Luis Suárez, Ousmane Dembélé et, surtout, Lionel Messi, chef de file incontesté et incontestable du Barça. Ceci étant, la générosité dans l’effort permanente d’Antoine Griezmann, tout comme son talent certain, deux qualités largement louées par le vestiaire barcelonais, auraient dû calmer les doutes.
7 – Aucun joueur n’a été impliqué sur plus de buts qu’Antoine Griezmann en Liga cette saison (7 – 4 buts, 3 passes décisives). Adopté. @AntoGriezmann @fcbarcelona_fra pic.twitter.com/OCx3oyfPf4
— OptaJean (@OptaJean) 19 octobre 2019
En effet, là encore, il n’y a aucune raison de s’affoler, bien au contraire. Si la MSG doit encore parfaire ses automatismes, comme l’a justement souligné le numéro 17 catalan lui-même samedi, après une nouvelle victoire face à Eibar (3-0), les progrès sont visibles et les performances d’Antoine Griezmann s’améliorent considérablement. En l’absence récurrente de Messi lors des premiers matchs de la saison, l’attaquant français, quoi qu’on dise de lui, a parfaitement assumé son rôle et s’est clairement imposé comme le leader offensif du club blaugrana, du moins comme sa principale menace sur le front de l’attaque : si les stats ne disent pas tout, elles mettent en valeur une tendance : celle qu’Antoine Griezmann a fait mieux que trouver sa place et qu’il l’assume déjà pleinement, tout autant qu’il pèse sensiblement sur le jeu du Barça, premier du championnat malgré un début d’exercice que l’on a pu dire laborieux. Ce mercredi, les hommes de Valverde affrontent le Slavia Prague, une occasion parfaite de rassurer définitivement les sceptiques : si Antoine Griemann est encore en rodage, on imagine en effet à peine ce qu’il pourrait donner lorsqu’il sera parfaitement intégré.
Par Valentin Lutz