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Amed Davy Sylla : « Au Danemark, le prélèvement à la source, ça facilite les choses »

Propos recueillis par Ugo Bocchi
7 minutes
Amed Davy Sylla : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Au Danemark, le prélèvement à la source, ça facilite les choses<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

S'il y a bien un joueur qui peut parler du pays de « la petite sirène » aisément, c'est Amed Davy Sylla. Après une expérience (ratée) au LOSC, le Franco-Ivoirien s'est expatrié pendant trois ans au Danemark. Entretien.

Premièrement, pourquoi s’être autant expatrié au Danemark ?

Quand j’étais au LOSC, en équipe réserve avec Jean II Makoun et Matt Moussilou à la base, je ne suis pas passé pro. J’ai eu une blessure, une petite intervention au ménisque, et à la fin, je me suis retrouvé dix mois sans contrat. J’étais en relation avec Mikkel Beck le joueur danois de Lille (aujourd’hui agent de joueur confirmé, ndlr), et il m’a offert une opportunité de jouer au Danemark. C’est comme ça que je suis parti vers de nouvelles aventures.

Aussi simple que ça ?

Oui, c’est comme ça que j’ai pu me relancer. Et je suis arrivé du jour au lendemain dans le Nord du Danemark, à Farum. L’une des villes les plus au nord du pays. Je fais un essai dans la deuxième division. Et du coup, j’ai signé mon contrat. Le football danois est un football rugueux, mais aussi technique. Les jeunes sont très bons, c’est une autre mentalité, on ne lâche rien sur le terrain, tout le monde qui défend, tout le monde qui attaque, si tu perds ton ballon, c’est toi qui dois le récupérer. En France, ce n’est pas du tout le même esprit. Et puis, j’ai fini par trouver ma place de titulaire. Ensuite, mon club a fait faillite, l’actionnaire majoritaire a eu des problèmes financiers. Bref, on a rompu notre contrat. Et donc je suis parti, en prêt toujours avec Mikkel Beck, aux îles Féroé, à la base six mois, mais j’y suis resté finalement trois ans, et puis je suis revenu au Danemark.

Et tu es revenu au Danemark parce que ça te plaisait ?

Oui, j’aime bien le style de vie. La langue, j’ai mis longtemps à la parler parce que je parlais couramment anglais. Et quand on est bilingue, on s’exprime assez facilement là-bas. Mais non, je dirais que c’est un petit pays comparé à la France, mais très bien organisé. On utilisait beaucoup les vélos. Sans gêne. On se rend compte que c’est plus utile que les voitures. Mais en revanche, on se rend aussi compte que les hivers… Globalement, on s’arrêtait de s’entraîner fin octobre. On avait une longue trêve hivernale. D’un mois ou plus. Et on avait un mois de coupure complet parce qu’il faisait trop froid. Ensuite, on reprenait avec du foot en salle ou alors avec des stages dans un pays plus chaud. Finalement, le championnat ne reprenait que mi-mars. Mes pieds (congelés) s’en souviennent.

Et après le Danemark, direction les îles Féroé ?

Ouais, et c’était mieux au niveau du climat. Toute ma carrière, j’étais toujours esseulé, j’ai toujours dû prouver, j’étais extra communautaire, j’avais un passeport ivoirien, aujourd’hui je suis naturalisé français, mais j’avais beaucoup de problèmes avec les titres de séjour… Bref, j’ai souvent pris le contrat qu’on me proposait finalement. Et c’est comme ça que j’ai atterri aux îles Féroé. Et donc du coup, c’était correct financièrement. Je suis parti à l’aveuglette là-bas et je suis parti pour six mois, finalement je suis resté trois ans. J’ai fait quelques matchs de Ligue des champions contre le Fenerbahçe d’Anelka. On a passé les deux premiers tours. Des expériences assez riches. Et des Féroé, je suis parti à Malte six mois à Birkirkara, qui est le deuxième ou troisième club de Malte. En rivalité avec La Valette, j’y ai gagné la coupe nationale. Et là, j’ai eu la possibilité de revenir au Danemark. Et j’y suis retourné. À Copenhague cette fois-ci, daans le deuxième club de la ville, le FC Amager, qui montait en première division. J’y ai signé trois ans, et au bout de sept mois, le club fait faillite.

Encore ?

Ouais, moi, je me suis dit que c’était bon, j’ai signé trois ans de contrat, je suis bien, que je peux ramener ma famille… Mais non, je me retrouve à discuter avec l’UNFP du Danemark, pour avoir gain de cause sur mon contrat. Bref, et du coup, je me suis fait prêter dans un autre club à Copenhague, j’ai terminé la saison, je marque pas mal de buts. Et puis finalement, j’ai signé à Istres. Du coup, c’était mon dernier contrat pro avec Henri Stambouli, une super année. Mais après, j’ai eu des blessures, et fin de carrière.

Et la vie au Danemark, c’est comment ?

Les Danois, ils ne se prennent pas du tout la tête. C’est une culture chaleureuse… Mais pour un latin, c’est autre chose. Disons qu’un latin peut être choqué au début parce qu’il n’y a pas de contact. Le « bonjour » , c’est « hi » et c’est tout. Des fois, on entrait dans les vestiaires et il n’y avait n’a même pas de contact. On ne sert pas la main, pas de bise, comme dans le Sud de la France. Mais pour eux, c’est normal. Et puis après, on s’y habitue. Mais je pense en revanche que le système d’imposition prélevé à la source, c’est bien. C’est facile parce qu’on reçoit le salaire net. Même si l’imposition est très élevée.

Tu penses que le prélèvement à la source est une bonne chose ?

Oui, ça facilite beaucoup de choses, parce que quand on a son contrat de travail, en fonction de la fourche salariale, on définit le pourcentage mensuel prélevé (il est prélevé automatiquement sur le compte) et puis on reçoit le net à la fin du moi. C’est mieux.

La France devrait s’en inspirer ?

Oui. De toute façon, à chaque fois qu’on fait un reportage sur les impôts, ou le prélèvement à la source, la France s’intéresse au Danemark.

Ça t’a simplifié la vie ou pas ?

En fait, c’est vachement trompeur. Au début, quand on ne connaît pas la fiscalité du pays, le salaire brut peut paraître très élevé, mais il faut faire attention. Le taux d’imposition peut être de 45 ou 50 %. Et pour un joueur, il faut prendre ça en compte. Mais en tout cas, ça facilite beaucoup de choses. Moins de paperasses et tout ça…

Sinon, à part l’impôt à la source, il y a d’autre choses à découvrir du Danemark ?

La bière. C’est particulier parce qu’ici en France, on est très rigoureux avec les footballeurs. Mais au Danemark, même contre des mecs de première division, il me semble qu’on a bu des coups contre eux. Je ne trouve pas cet esprit incompatible avec la performance sportive. Bien sûr, il ne faut pas qu’un sportif boive de l’alcool. Mais eux, ils sont très performants tout en sachant faire la fête et décompresser.

Et le football danois, ça ressemble à quoi exactement ?

C’est rugueux, mais ce n’est pas du kick and rush. C’est avant tout l’esprit scandinave qui domine. Ils ont des joueurs techniques comme Laudrup, à l’ancienne, mais l’état d’esprit est toujours irréprochable. La gagne, du style « je ne lâche rien » sur le terrain, on ne se roule pas par terre, pas de simulation… On ne fait pas ça là-bas, ce n’est pas dans leur mentalité. Même à l’entraînement. En deux contre deux, on se rentrait dedans. C’était vraiment tough.

Tu fais quoi maintenant ?

J’ai repris mes études, je fais un master en informatique. Système et réseau. J’ai tourné la page foot. Six et sept mois après ma dernière expérience à Istres à cause d’une arthrose. J’avais un bac scientifique en arrivant de Côte d’Ivoire. Et aujourd’hui, je travaille dans une entreprise nantaise, je suis responsable du système d’information. Je gère tous les serveurs Windows ou Linux, les bases de données messagerie et la partie réseau d’entreprise… Tout ce que le client ne va pas voir. Mon entreprise s’appelle Lengow. Ils font de l’hébergement software qui propose une solution de commerce.

Ce n’est pas courant de se reconvertir dans l’informatique, non ?

Non, quand j’ai proposé mon CV lors de ma reconversion, on a une image péjorative du footballeur qui n’a rien dans la tête, et quand j’ai fait mon dossier, le président m’a vu arriver, il s’est dit : « Mais qu’est-ce qu’il vient faire ici ? » Mais moi, je pense que tout joueur de foot devrait avoir une idée de son après-football.

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