- France – Coupe de France – 16e de finale – Rouen/Marseille
V. Fourneyron : « Ce match Rouen/OM en 93 a pesé très lourd »
L'affiche décalée de Coupe de France entre le FC Rouen et l'OM est l'occasion de se remémorer la précédente confrontation entre les deux équipes, il y a 20 ans, avec la qualification polémique des Marseillais sur un pénalty inexistant. L'actuelle ministre des Sports Valérie Fourneyron était à l'époque médecin du club normand et donc aux premières loges pour assister au match. Elle se souvient.
Rouen, stade Robert-Diochon, 30 mars 1993. Le FC Rouen, leader de son groupe de D2, affronte l’Olympique de Marseille, le leader de D1 qui sera sacré quelques semaines plus tard champion d’Europe. C’est l’affiche des 16es de finale de la Coupe de France, et TF1 a dépêché pour l’occasion son duo vedette Thierry Roland et Jean-Michel Larqué pour commenter ce match en direct. Pendant 80 minutes, les locaux vont déjouer les pronostics, malmenant sérieusement la grosse équipe de l’OM, bien que privée de Boli, Bokšić, Sauzée et Barthez, laissés au repos. La domination rouennaise reste néanmoins stérile, les attaquants Christophe Horlaville et Jean-Pierre Orts se heurtant à un Pascal Olmeta des grands soirs, qui parvient à maintenir son équipe à flot. La partie bascule à la 81e minute de jeu, quand Jean-François Richard tacle l’éphémère Marseillais Igor Dobrovolski, qui exagère sa chute pour atterrir dans la surface de réparation rouennaise. Siffler une faute sur cette action, c’est déjà contestable, désigner le point de pénalty, c’est carrément surréaliste. C’est pourtant ce que fait l’arbitre M. Ramos, qui n’hésite pas une seconde, malgré les protestations des Diables rouges. Rudi Völler se charge de la transformation. Score final : 1-0. Tandis que l’OM conquiert les sommets à la fin de cette saison 92-93, le FC Rouen porte le deuil de cette douloureuse élimination. Le club manque la montée en élite et entame une lente descente aux enfers qui va durer une bonne décennie.
Actuellement 13e du championnat national, l’équipe normande, désormais dirigée par Didier Ollé-Nicolle, remonte petit à petit la pente et retrouve de l’ambition. En attendant de pouvoir viser la promotion en L2, elle a l’occasion de retrouver l’OM, 20 ans après, dans ce même stade Diochon, toujours pour le compte des 16es de finale de la Coupe de France. L’actuelle ministre des Sports Valérie Fourneyron, qui était médecin du FC Rouen en 1993 et sur le banc lors de ce fameux match du 30 mars, évoque cette rencontre particulière, pour elle comme pour tous les supporters rouennais, François Hollande inclus.
Qu’évoque pour vous ce 16e de finale de Coupe de France Rouen-Marseille de 1993 ?J’en garde un bon souvenir, d’abord grâce à l’ambiance qui régnait à Diochon. C’est le stade avec lequel j’ai découvert la passion du football et il était plein ce soir-là. Il devait y avoir aux alentours de 17 000 personnes en tribunes, avec une équipe de Rouen leader de son groupe de D2 à l’époque. En face, c’était l’OM, avec ses grands noms… Le Marseille de Goethals, même s’il n’était pas sur le banc contre Rouen car il était suspendu. Je crois que c’était Stambouli qui le suppléait du coup… Donc j’ai le souvenir d’une ambiance terrible pour une confrontation entre le leader de D2 et le leader de D1.
Sur le déroulé du match…Rouen a bousculé son adversaire, on peut le dire avec objectivité, même si je n’en avais pas énormément à l’époque, forcément ! Mais vraiment, l’équipe avait réalisé un superbe match, avec notamment une excellente prestation de Roger Hitoto au milieu de terrain, que j’ai eu le plaisir de revoir il y a peu. Devant, il y avait « JPO » également, Jean-Pierre Orts, qui joue encore aujourd’hui de temps en temps avec l’équipe du Variétés… Malheureusement, le médecin que j’étais avait eu du travail lors de ce match, beaucoup trop de travail, avec notre gardien Christophe Lechevalier qui s’était fait un croisé antérieur très rapidement. Une grosse blessure, qui d’ailleurs a gâché la suite de sa carrière.
Vous souvenez-vous de cette fin de match à rebondissements ?Dans les arrêts de jeu (en fait à la 81e minute, NDR), on voit l’arbitre du match M. Ramos – j’ai encore bien en mémoire son nom ! – siffler ce pénalty pour une faute qui est complètement en dehors de la surface de réparation. Une faute pas évidente en plus, vraiment pas évidente, sur un tacle de Richard il me semble. Derrière, Rudi Völler trompe Fabrice Bruneau, qui avait remplacé Christophe Lechevallier dans les buts. Ce match, qui était une fête, retransmis qui plus est à la télévision, se termine mal avec une défaite qui apparaît comme injuste. J’étais personnellement doublement déçue : du résultat et des deux entorses graves dont j’avais eu à m’occuper au cours du match (de Lechevallier et Bochert).
Y a-t-il eu un avant et un après ce match face à l’OM du côté du FC Rouen ?Oui, ce match a pesé très lourd. Il y a eu de la déception, des blessés, puis une succession de dépôts de bilan, de résultats pas à la hauteur… Le club a eu des difficultés à se reconstruire pendant une bonne dizaine d’années. Aujourd’hui, j’ai d’autant plus de satisfaction à voir le club retrouver un socle solide. Même si c’est encore trop tôt cette saison pour envisager une remontée, on sent que les bases du FCR aujourd’hui sont plus solides pour affronter l’avenir.
Savez-vous dans quel état d’esprit les Rouennais abordent ce 16e de finale de Coupe ?Je sens une grosse motivation d’une équipe qui est vraiment en pleine construction et d’un club qui nous fait plaisir. L’entraîneur Didier Ollé-Nicolle semble avoir construit un bon groupe. C’est dommage, il manquera leur attaquant vedette, Ousmane Cissokho, qui est suspendu.
Serez-vous en tribunes ?Oui, je vais aller suivre ce match avec Marie-Arlette Carlotti (ministre déléguée en charge des personnes handicapées et député à Marseille, Ndlr), ce qui fait que le gouvernement va être doublement représenté. Et je sais que François Hollande suit avec beaucoup d’attention les résultats du club qui lui a donné sa première licence : les Diables rouges du FCR. On s’est vu récemment lors des vœux à la jeunesse et bien sûr, on a un peu parlé de ce match… Il attend comme moi que le FCR retrouve la Ligue 2 le plus rapidement possible.
Le sentiment de revanche est-il présent à Rouen ?Oh, il n’y a plus les mêmes acteurs sur le terrain ! Certainement que des supporters ont encore en souvenir ce match, mais je ne crois pas qu’on peut parler de revanche… On est dans un autre contexte. Et puis il n’y a pas besoin d’évoquer le match d’il y a 20 ans pour trouver des motifs de motivation : quand on joue une grande équipe comme l’OM et qu’on est en National, on a toujours envie de se surpasser. C’est surtout ça que les joueurs qui composent l’équipe rouennaise aujourd’hui vont retenir au moment d’entrer sur le terrain, j’en suis persuadée.
Un pronostic ?Que le meilleur gagne, bien sûr. Peut-être que sur ce match Rouen en voudra-t-il plus ? Mais la ministre des Sports est là pour encourager les deux équipes. Enfin, si le club de ma ville d’origine peut l’emporter, ce sera un grand plaisir… Allez, disons 1-0 !
Propos recueillis par Régis Delanoë