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Raphaël Varane, génie fragile
À 21 ans, le défenseur central de l'équipe de France respire la classe et la maturité. Il l'a encore démontré face au Honduras pour ses débuts en Coupe du monde. Normalement, il est chez les Bleus pour quinze ans. Sauf si son corps, plutôt fragile, le prive de cette perspective.
Cette saison, Raphaël Varane a disputé 14 matchs de championnat avec le Real Madrid. La faute à un genou récalcitrant. Cloué à l’infirmerie entre novembre et février, le défenseur central arrive au Mondial frais et dispos. Sauf que cette blessure n’est pas anodine chez l’ancien Lensois. C’est simple, Varane n’a jamais disputé une saison sans blessure depuis ses débuts professionnels en 2010. Lors de ses trois saisons madrilènes, Varane a disputé 9, 15 et 14 matchs de championnat. Sa meilleure saison, 2012/2013, affiche 35 matchs toutes compétitions confondues. Fragile ? Oui et non. À 13 ans, le jeune Varane est stoppé dans son élan. On lui décèle la maladie d’Osgood-Schlatter. Une saloperie qui provoque des douleurs fréquentes au genou chez les jeunes sportifs. D’ailleurs, son genou gauche craque subitement. Il est immobilisé quatre mois. Quand il revient, alors en pleine croissance, c’est son genou droit qui pète dans la foulée. Rebelote. Quatre mois à nouveau. Ces huit mois d’indisponibilité l’ont endurci. Alors qu’il voit ses copains de promotion enchaîner les matchs, il est en rééducation. Mentalement, il est déjà armé pour la suite. Au sein du RC Lens, pas de panique, on sait que l’on tient une pépite. Lorsqu’il débarque en 2002, à neuf ans, une énorme touffe de cheveux orne son crâne d’enfant. Comme Charles-Édouard Coridon, alors meneur de jeu du RCL, possède la même coiffe, Raphaël Varane est (re)baptisé « Charly » . L’histoire raconte que Varane joue milieu de terrain et qu’il marque des buts du rond central dès le coup d’envoi.
Sir Alex Ferguson et les bouchées à la reine
Couvé par ses parents (papa est aide-soignant au CHU de Lille, maman est professeur d’anglais), le Lillois Varane s’épanouit pleinement chez les Sang et Or. Avec ses potes de promotion Kondogbia et Thorgen Hazard, il apprend les rudiments du métier. Celui que l’on surnomme le « Ch’ti martiniquais » séduit tous les éducateurs lensois, à commencer par Jean-Guy Wallemme, qui le lance en Ligue 1 à 17 ans. La suite ? Tout s’accélère. Manchester United est sur les rangs. La rumeur raconte que Sir Alex Ferguson en personne se serait déplacé jusque dans le Nord pour convaincre les parents du joueur. On y aurait même mangé des bouchées à la reine au cours d’un repas. Pourtant, c’est au Real Madrid que Varane va atterrir à 18 ans. Il faut dire qu’entre-temps, Zinedine Zidane a appelé le futur bachelier pour le convaincre de rejoindre la capitale espagnole. Zizou remporte la mise.
Au Real, il bluffe vite les observateurs du club, à commencer par José Mourinho. Il hérite vite d’un surnom : Don Limpio (Monsieur Propre). Derrière Sergio Ramos et Pepe, il devient vite le numéro 3 dans la hiérarchie, renvoyant l’international espagnol Raúl Albiol à ses chères études. Quand il joue, Varane a déjà tout : élégance, jeu de tête, relance, intelligence, maturité, sans oublier qu’il se retourne très vite. Ce qui surprend le plus, finalement, c’est cette sérénité qui le caractérise. En même temps, le natif de Hellemmes a intégré dès 13 ans le pôle Espoirs. Dans un premier temps, Varane vivait chez ses parents avant de rentrer au centre de formation du RC Lens. Dans sa tête, il est construit et structuré. Et ça se voit. Il a un site internet perso et gère parfaitement son compte Twitter, entre selfies et concours pour ses abonnés. Il a cette envie de rester accessible en dépit de son statut. Il a la tête sur les épaules. Ça a toujours été le cas. Finalement, cette fragilité physique est un détail. L’important n’est pas de jouer tous les matchs, mais de jouer les matchs importants.
Par Mathieu Faure