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On était à la Veltins-Arena

Par Ali Farhat, à Gelsenkirchen
5 minutes
On était à la Veltins-Arena

Bières, saucisses et vestes en jean. Bienvenue à Gelsenkirchen, dans l'hystérie de la Veltins-Arena, où Schalke a livré, jeudi soir, une partie moisie face à Larnaca, en Europa League.

Vacances de la Toussaint en Rhénanie du Nord-Westphalie, alors forcément ça laisse du temps à la jeunesse de Gelsenkirchen pour venir remplir le stade pour un match d’Europa League face à l’AEK Larnaca. En même temps, le prétexte est facile : si Huntelaar et consorts ont été capables de gagner 5-0 à Chypre, à domicile, les Königsblauen peuvent logiquement faire encore plus mal sur leur pelouse rétractable. Huub Stevens se permet même de faire tourner son effectif: Raul, Jones et Höwedes ne font pas partie du groupe, Farfan et Holtby font banquette. Le match ne commence qu’à 21h05, ce qui est tard pour un Allemand qui a plus l’habitude des matchs dans l’après-midi. Alors on arrive deux heures plus tôt, on mange des saucisses et on boit de la bière. Un grand classique. La Veltins Arena a beau être l’une des enceintes les plus classes d’Europe, son fonctionnement est tout l’inverse d’une boîte de nuit. Ici, pour légitimer son appartenance au S04, il faut sortir l’attirail complet, écharpes attachées à tous les membres du corps pour les ados, vestes en jean blindées de pin’s pour les plus vieux, les durs de durs.

« Battez-vous »

A l’intérieur, c’est la Nordkurve qui met l’ambiance. Il y a des places assises, mais tout le monde passe son temps debout. Les chaises, c’est juste pour les chorégraphies, comme lorsque Schalke obtient son premier corner à la 8ème minute: les supporters s’assoient, se lèvent d’un coup et gueulent « Auf geht’s Schalke, kämpfen und siegen! » ( « Allez Schalke, battez-vous et gagnez! » ) comme si on leur avait annoncé que leur ville était désormais jumelée avec Dortmund. C’est dire la violence du truc. Schalke domine le début de la rencontre, mais très vite, le match perd de son rythme. « Vorwärts Schalke, schiess ein Tor » ( « En avant Schalke, marque un but » ). Ouais, c’est vrai, Vorwärts, quoi, il y a deux semaines, ça avait l’air facile. En plus, ça se fait pas, il y a tous ces mecs des différents fan-clubs qui sont venus de Berlin, de Düsseldorf, de Grande-Bretagne, de Belgique (Marc Wilmots oblige). Au moins un petit but, quoi… Mais non. Que dalle. Alors les tribunes commencent à dialoguer entre elles, pour savoir si c’est bien leur équipe qui joue: « Schalke » lance la Nordkurve. « Null-Vier » , répond-on en face. Au moins une dizaine de fois, pour être sûr.

Le mystère de l’escalope

C’est bien donc Schalke qui joue. Enfin, qui essaye de jouer. Il y a beaucoup d’erreurs techniques et tactiques, et très vite, le public commence à s’impatienter. Les sifflets fusent, les Königsblauen doutent. Ils se font même presque renverser à la 30e minute, mais Priso, qui pensait avoir dribblé Unnerstall, se fait finalement rattraper par le portier qui sort sa main ferme d’on ne sait où. L’hôte se fait malmener à domicile, et il faut deux nouvelles parades d’Unnerstall (32e, 33e) pour empêcher Larnaca d’ouvrir le score. Ce qui, au vu des actions de part et d’autre, n’aurait pas été une arnaque. Matip se révolte alors, tente une montée fantastique à la Lucio, entre dans la surface, élimine d’une feinte de corps mais se fait rattraper in extremis (40e). Mi-temps, une magnifique bronca accompagne les joueurs aux vestiaires. Un quart d’heure pour descendre chercher de quoi manger, de quoi boire. Pour payer, il faut utiliser la monnaie du stade, des « Knappen » , qui est en fait le nom qu’on donnait aux mineurs, à l’époque. Une Bratwurst mit Brötchen, un Schnitzel mit Brötchen aussi. Si l’accompagnement logique est une pinte de Veltins, la marque de bière étant le principal sponsor du club, il reste un grand mystère outre-Rhin à élucider. Pourquoi un si petit pain pour une saucisse ainsi qu’une escalope panée qui dépasse de partout?

Le nez pété d’Huntelaar

Le mystère ayant fini dans un estomac, c’est la reprise. Sur la pelouse, rien ne change. Schalke n’y arrive pas. Alors Stevens fait entrer Holtby et Farfan pour Jurado et Marica. A la 65e minute, les 52 077 supporters de Schalke (auxquels on enlèvera un petit millier de Chypriotes Grecs) croient à une ouverture du score, mais Holtby bute sur le portier adverse. La minute d’après, tout s’inverse, c’est à Schalke d’être en panique. Une fois de plus, Unnerstall sauve les meubles, et quand ce n’est pas lui, c’est Matip qui nettoie comme il peut. Matip est non seulement un pompier, mais aussi un docteur, il s’occupe des crampes des joueurs adverses. Baumjohann a beau faire lui aussi son entrée, Schalke a peu d’idées. A partir de ce moment, les Chypriotes commencent à se dire que ça sent bon, et commencent à endormir les locaux, à coups de crampes et de blessures inexistantes, ce qui déclenche la furie dans le stade. Larnaca ne craque pas.

Le sort est avec l’AEK, même : à dix minutes de la fin, Matip s’impose dans la surface adverse, et met deux Chypriotes et un coéquipier à terre. Strike. Les Chypriotes se relèvent, le joueur de Schalke, Huntelaar en l’occurrence, doit quitter la pelouse définitivement, le nez pété. Les dieux sont avec eux, doivent se dire les visiteurs, qui ne craquent toujours pas, et qui sont même sur le point de marquer en contre, mais deux fois coup sur coup, Unnerstall sauve encore les siens. Peut-être que comme Thomas Price, il finira à Hambourg. Null-Null, fin du match, les joueurs prennent très très cher de la part de leur public. Après la rencontre, une serveuse apporte une dizaine de bières aux joueurs. Paraît que ça aide, parfois, pour les contrôles anti-dopage. Mais ce soir, pas sûr qu’ils les aient vraiment méritées…

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