- Décès d'Olivier Baudry
Olivier Baudry, une certaine idée de l’élégance
Trois mois à peine après la disparition de Stéphane Paille, le FC Sochaux-Montbéliard est de nouveau en deuil. Olivier Baudry est mort ce dimanche à 44 ans, des suites d’une longue maladie. Sa classe naturelle et son élégance balle au pied en avaient fait un joueur rare que les esthètes auraient aimé voir passer plus de temps sous les projecteurs.
Il n’est pas nécessaire d’être supporter sochalien pour être touché par la disparition d’Olivier Baudry. N’importe quel fan de foot de plus de 30 ans se souvient forcément de ce joli numéro 10 à la silhouette longiligne, au buste droit, aux cheveux longs et à cet indissociable maillot jaune qui, n’en déplaise aux habitués de Bonal des années 1990, aurait peut-être mérité de changer de couleur à un moment ou à un autre. En 1996, par exemple, lorsque Bordeaux lui fait les yeux doux : « Sauf que c’est Johan Micoud qui signe à Bordeaux et il fait une belle carrière derrière. J’avais laissé passer ma chance. Peut-être par manque de caractère… » nous confiait-il l’an dernier dans une longue interview.
Mais le natif de Vannes était attaché à sa terre d’adoption et au club sochalien qu’il a toujours considéré comme sa deuxième famille depuis son arrivée à la fin des années 1980. Il n’a pas 20 ans lorsqu’il joue son premier match avec les pros (en Coupe de France contre Rodez) et lance sa carrière prometteuse qui le voit rapidement côtoyer Thuram, Dugarry ou Zidane en équipe de France Espoirs. « Je garde toujours comme preuve qu’à un moment de ma carrière, Raymond Domenech me préférait à Zidane » , se souvenait-il, un brin nostalgique. Mais la saison 1995-1996 est un calvaire pour les Sochaliens qui terminent bons derniers et descendent en D2. Baudry reste pourtant au club en capitaine courage et exemplaire : « Pour moi, c’était inconcevable de quitter Sochaux. Je me disais déjà que j’allais finir ma carrière là-bas.(…) Le FC Sochaux, c’est ma famille, ma maison. »
Frappe limpide et années de galère
Pendant que ses anciens coéquipiers en Espoirs se préparent à soulever la Coupe du monde, Olivier Baudry se bat pour retrouver la lumière. Après trois années à flirter avec le podium, le club retrouve l’élite en 1998, en gagnant 2-1 à Martigues lors de la dernière journée de championnat, grâce notamment à une frappe limpide des 25 mètres signée du fameux pied gauche de son capitaine.
Mais l’embellie est de courte durée puisque, privés de leur meneur de jeu trop souvent blessé, les Lionceaux retrouvent la D2 à l’issue de l’exercice suivant. Barré par l’éclosion de Camel Meriem, il se décide finalement à quitter le club de son cœur pour la Suisse et Lausanne où il ne reste qu’une saison avant de s’engager à Saint-Étienne pour deux nouvelles années de galère. En 2003, à 30 ans à peine, il tourne le dos au haut niveau et décide de passer ses diplômes d’entraîneur tout en continuant à tâter le cuir du côté de Belfort puis en D2 suisse, où il devient entraîneur-joueur avec le SR Delémont.
Old Trafford, Camp Nou ou Bonal
En 2012, alors qu’il est toujours joueur de foot, à presque 40 ans, il doit mettre sa carrière entre parenthèses lorsqu’on lui diagnostique un cancer du pancréas. « Durant tout mon combat, j’avais en ligne de mire de rechausser les crampons » , racontait-il en février 2016, après quatre ans de combat contre la maladie. « C’est pas un putain de cancer qui va m’arrêter à 40 ans. Moi, tant qu’on me fout pas dehors, je joue. » La passion du cuir. En attendant de retrouver le terrain, il était retourné à Sochaux en 2014 pour prendre en charge les U17 et coordonner l’école de foot. Depuis l’été 2016, il était chargé du développement et de la performance.
Avec un cursus comme le sien, beaucoup seraient partis dans l’indifférence. Pas lui. On ne saura jamais si le maillot de Manchester ou du Barça auraient été à sa taille, mais finalement quelle importance ? À Old Trafford, au Camp Nou ou à Bonal, la conduite de balle est la même. Celle d’Olivier Baudry était sublime et les vrais amoureux du ballon ne l’ont pas oublié(e). Aujourd’hui, c’est ça qui est important. Salut l’artiste.
Par Thomas Vennin