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Nouvelle polémique sur l’ambiance du Parc
Depuis une semaine, une controverse agite le microcosme des supporters parisiens concernant l’animation du Parc. Certains supporters reprochent à SOS Racisme et à l’Union des Etudiants Juifs de France de contribuer à assurer l’ambiance dans les virages, via un collectif dénommé "Sportitude" dont l’objectif premier est de lutter contre les discriminations.
La transformation de l’ambiance dans les virages du Parc des Princes depuis les dissolutions des groupes ultras et le plan Leproux est un sujet récurrent de débat dans l’entourage du club parisien. Depuis quelques temps, il se murmure que les nouveaux propriétaires du PSG apprécient l’affluence mais pas l’ambiance de l’enceinte de la Porte d’Auteuil. Selon RMC, Jean-Claude Blanc, l’actuel directeur général du PSG, aurait même demandé au ministère de l’Intérieur un assouplissement du plan Leproux, afin de relancer, en favorisant le retour des anciens abonnés, une ambiance pour l’instant un peu morne. Il se serait vu opposer une fin de non-recevoir de la part de Claude Guéant. Manière d’avouer – s’il en était encore besoin – que le plan Leproux est largement piloté depuis la place Beauvau.
« Accréditation ‘animation/SOS Racisme’ »
Pourtant, depuis l’automne, le PSG s’efforce de renforcer l’ambiance dans les virages, en confiant notamment le micro à des supporters bien encadrés. L’un d’eux, appelons-le Marc, raconte comment les choses se sont faites avec le club : « Au mois d’août, des gens étaient payés par le club pour faire la samba et créer une illusion d’ambiance. Avec quelques potes, on voulait monter quelque chose en virage. On est allé voir le club pour essayer de négocier la charte 12 [qui définit les conditions de formation d’une association de supporters au Parc, ndlr], très contraignante. Ils nous ont répondu que c’était non négociable, mais qu’ils allaient par contre nous faciliter les choses, en nous donnant un tambour, une sono et du matos… On était un peu des rats de laboratoire, on était une vingtaine, on essayait de lancer les chants mais ça partait un peu dans tous les sens. On n’avait pas l’expérience des anciens meneurs » . Interrogé en décembre, Jean-Philippe d’Hallivillée, directeur de la sécurité du PSG confirmait « avoir encouragé ces initiatives pour relancer l’ambiance » . Quelle ne fut donc pas la surprise de Marc en arrivant au Parc lors du dernier PSG-Montpellier : « Quand je suis arrivé dans la tribune, le chef d’équipe des stadiers du secteur Boulogne m’a dit qu’il était étonné que ce ne soit pas moi qui assure l’ambiance, car une vingtaine de personnes était arrivée avec des accréditations sur lesquels il était écrit ‘animation/SOS Racisme’ avec un bandeau PSG autour du bras » . Malgré nos demandes, le directeur de la sécurité du PSG n’a pas souhaité commenter ce témoignage. Marc poursuit : « Je me suis mis à l’écart et j’ai vu ces personnes au centre du virage prendre le micro et le tambour. Je ne voulais pas être lié à ça » .
SOS Racisme au micro ? L’information fait bondir son vice-président Herman Ebongué : « C’est complétement faux, on n’a pas la latitude, ni la compétence pour se charger de ça, c’est ubuesque ! » . Du côté de l’Union des Etudiants juifs de France (UEJF), également suspectée de prendre désormais en charge les animations en virage, le discours est plus circonspect : « Ce n’est pas le récit qu’on m’en a fait, mais si c’est le cas, c’est plus un déplacement de la part des militants de l’association qu’une volonté de notre part. Et si j’apprends que c’est vérifié, ça me déplairait » , assure son président Jonathan Hayoun. Pourtant, sur le site Canal Supporters, Jacqueline Bensoussan, militante de l’UEJF et secrétaire générale du collectif Sportitude, a déclaré : « Il est tout à fait exact que nous avons pris place en tribune via le collectif Sportitude dont SOS Racisme fait pleinement partie. […] Nous avons pris le micro depuis le dernier match contre Montpellier, et encore pas bien longtemps » . Contactée par So Foot, Jacqueline Bensoussan ne souhaite plus s’exprimer sur cette question, sinon pour dire que « L’ambiance c’est pas nous, notre mission est très spécifique » .
Des membres du collectif Sportitude au micro ?
Quelle est donc la mission de SOS Racisme et de l’UEJF dans les travées du Parc ? Ces associations ont fondé, via le collectif Sportitude et en partenariat avec le PSG, une commission de surveillance, composée d’une cinquantaine de membres à chaque match. Cette commission est présente depuis plus d’un an au Parc des Princes. « Il y a dans cette commission des membres de SOS Racisme et de l’UEJF, mais aussi des bénévoles qui n’ont aucun lien avec ces associations,indique Herman Ebongué. Ils sont chargés de contrôler d’éventuels actes ou paroles racistes ou antisémites au sein du Parc des Princes » .
Est-ce que certains membres de cette commission, déçus eux aussi de l’ambiance parisienne, auraient outrepassé leur compétence en voulant prendre le micro ? Plusieurs témoignages concordants portent à le croire. Jacqueline Bensoussan, toujours sur le site Canal Supporters : « Plusieurs membres de la communauté ont demandé à être en charge de l’animation des tribunes » . Nous avons contacté l’un des supporters qui lançaient les chants au Virage Auteuil, lors de ce même PSG-Montpellier. Selon plusieurs sources, il ferait partie du collectif Sportitude. Ce qui est certain, c’est qu’il a reçu la consigne de ne pas parler. De qui vient l’injonction, il ne le dira pas. Preuve, en tout cas, qu’un certain malaise s’est installé depuis les révélations controversées de Canal Supporters et de RMC. Et le PSG dans tout ça ? D’après différents témoignages, le club se serait associé à cette nouvelle initiative en acceptant que des membres de Sportitude prennent le micro, afin de relancer l’ambiance dans le cadre étriqué du plan Leproux. Malheureusement, le club de la capitale n’a pas voulu non plus répondre à nos sollicitations sur ce point.
« Le PSG considérait qu’il y avait trop de groupes politisés au Parc »
Mais pourquoi le fait que des membres du projet Sportitude aient pu prendre le micro en virage suscite de telles réactions parmi les supporters parisiens ? C’est que la direction du PSG et le ministère de l’Intérieur se sont vantés d’avoir débarrassé les tribunes parisiennes de la politique. Et voilà que celle-ci pointerait de nouveau le bout de son nez, par le biais de militants associatifs… SOS Racisme comme l’UEJF assurent que si certains de leurs membres participent à l’animation, ils ne le font pas au nom de l’association mais en tant que supporters du PSG. Et l’objectif de ces associations est avant tout la lutte contre les discriminations, pas la propagande politique.
Mais pour certains anciens des virages, ce discours n’est pas tenable : « Pendant des années, ils nous ont bassiné sur le fait qu’il y avait trop de groupes politisés au Parc » , se souvient Youssef, porte-parole de la K-Soce Team, ex-groupe du Virage Auteuil. « Nous aussi, on luttait contre le racisme » peste un autre ancien d’Auteuil. « Quand on est revenu en parcage, on a tiré un trait sur la politique, assure Youssef,ce qui a été bien pris au départ par le PSG et la préfecture. Et maintenant le PSG autorise des associations politisées et qui le revendiquent à se mêler de l’ambiance ?! Le discours du PSG n’a plus aucun sens pour nous, donc on va mener nos actions » . Et action, il y a eu samedi dernier dans le parcage visiteur de Gerland, à l’occasion de Lyon-PSG. Une mobilisation importante d’environ 1200 supporters, marquée par un craquage massif de fumigènes et de pétards pour protester contre le double discours du club à leur égard. « Ce n’était pas un craquage festif, témoigne un ancien viragiste présent à Gerland. C’était clairement contestataire » . « Ils n’ont pas fini d’entendre parler de nous, prévient un des supporters se qualifiant eux-mêmes d’ « historiques » . On a joué le jeu mais ils n’ont pas respecté ça » .
En novembre, le PSG aurait refusé une banderole de soutien à Kombouaré
Surtout, certains anciens abonnés sont surpris de s’entendre donner des leçons par Sportitude qui promeut « un supportérisme de qualité » : « Le collectif Sportitude veut éduquer les supporters, alors qu’ils n’ont aucune expérience des tribunes. Est-ce qu’ils sont venus nous voir ? Non, alors qu’ils fassent partie d’une commission de surveillance, OK, mais qu’ils ne viennent pas s’occuper de l’ambiance. Chacun son domaine » , lâche, remonté, Jérémy du collectif Liberté pour les Abonnés (LPA). De son côté, un ancien membre actif d’Auteuil prétend avoir été approché par SOS Racisme cet été : « En août, Herman Ebongué est venu nous voir, après avoir discuté avec les Qataris, pour nous proposer 100 abonnements fixes dans le Virage Auteuil, alors que les 5900 autres places du Virage restaient en aléatoire. Je ne sais pas si c’était de la poudre aux yeux de sa part… Mais, en tout cas, on a répondu que ça ne nous intéressait pas, on a une ligne de conduite, il est hors de question qu’on profite de privilèges alors que le reste du virage reste exclu » . Herman Ebongué dément fermement : « Je n’ai proposé un retour d’abonnements fixes à personne. Ce serait d’ailleurs contradictoire avec le soutien que j’ai apporté au plan Leproux » . Le vice-président de SOS Racisme ne cache pas en effet, « être totalement en phase avec les mesures prises par le ministère de l’Intérieur au Parc des Princes et avec les actions de la division nationale de lutte contre le hooliganisme » .
En tout cas, le retour de l’ambiance demeure un objectif pour le club, comme en témoignent les nombreuses animations organisées lors de PSG-Montpellier. Jérémy du collectif LPA analyse : « Le club veut remettre de l’ambiance au Parc des Princes mais sans lâcher la main sur ceux qui la mettent. Si on revient ils savent qu’on aura un rôle de contre-pouvoir alors ils s’appuient sur des associations comme Sportitude, parce qu’ils peuvent les contrôler » . Le témoignage de Marc abonde dans ce sens : « En novembre, lors de PSG-Nancy, on a voulu faire une banderole de soutien à Antoine Kombouaré. Mais Michel Mimran (directeur marketing du PSG, ndlr) a refusé et nous a également interdit de scander le nom de Kombouaré au micro sous peine de nous l’enlever. A ce moment-là, on s’est dit qu’il fallait qu’on prenne nos distances avec le PSG car on était un peu manipulé » .
Par Anthony Cerveaux