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Michael Jansen : « Les mecs jouent au footgolf pour avoir le style « funky golf » »

Par Matthieu Rostac, à Amsterdam
8 minutes
Michael Jansen : « Les mecs jouent au footgolf pour avoir le style « funky golf » »

Le footgolf aurait dû n'être qu'une simple blague du publicitaire néerlandais Michael Jansen. Au lieu de ça, ce sport mélangeant football et golf est devenu une discipline à part entière avec ses fédérations, sa Coupe du monde et ses champions du circuit. En France, notamment, où Ludovic Giuly est ambassadeur, tandis que Sylvain Wiltord occupe depuis l'année dernière le poste de sélectionneur national. Michael Jansen, lui, regarde d'un œil bienveillant sa création grandir exponentiellement. Rencontre.

Question bête, sans doute, mais quelles sont les règles du footgolf ?

Peu ou prou les mêmes qu’au golf. Au détail près que tu utilises des clubs en chair et en os (il se tape les cuisses, ndlr) pour frapper dans une balle plus grosse. Quelques règles différent, comme lorsque tu envoies ta balle dans l’eau. Au golf, ça coule. Bon, un ballon de foot, ça flotte. Donc tu dois attendre que la balle se soit arrêtée pour rejouer. Même chose lorsque le ballon se met à rouler à cause du vent, il faut attendre. Et ça arrive plus souvent qu’avec une balle de golf.

Comment vous est venue cette idée du footgolf ?

Quand on a débuté en 2008, c’était avant tout pour valoriser notre agence de communication Nothing. On voulait montrer qu’on était capables de monter une marque de toute pièce, ce qu’on savait faire auprès de potentiels annonceurs. Et on a trouvé que le footgolf, c’était assez original. Bon, au final, ça a plus effrayé les gens qu’autre chose. Ils se sont dit qu’on était trop occupés par notre stupide footgolf ! (rires) Donc on s’est dit que si on devait commencer un tout nouveau sport, autant y aller franco. On a fait ce premier tournoi de footgolf qui devait élire le champion des Pays-Bas. Des joueurs professionnels comme Theo Janssen, Kenneth Pérez, Roy Makaay, Pierre van Hooijdonk ou Ricky van Wolfswinkel ont participé. Ils se sont tous pointés en se demandant ce que ça pouvait bien être, un peu dubitatifs. Au début, ils frappaient dans la balle sans conviction, mais très rapidement, l’esprit de compétition est revenu et ils ont vraiment apprécié le concept de ce jeu. À la fin, ils étaient à fond. En guise de trophée, on a offert au vainqueur Theo Janssen une coupe en argent achetée d’occasion qu’on avait retapée. C’était un chouette trophée et il l’a toujours sur sa cheminée !

Il paraîtrait que Willem Korsten, ancien joueur du Vitesse Arnhem et de Tottenham, vous aurait soufflé cette idée de footgolf. Vrai ou faux ?

C’est vrai. En fait, son frère et moi sommes associés. Je ne me rappelle plus où Willem jouait à l’époque, Tottenham ou Leeds, mais il nous a raconté la façon dont il comptait le nombre de tirs qu’il lui fallait pour aller du terrain d’entraînement aux vestiaires ou aux toilettes. On s’était dit que ça ressemblait au golf et que ce serait facile à mettre en place. Ce sport, on ne l’a pas « inventé » à proprement parler. Il y avait beaucoup de gens avant nous qui le pratiquaient, mais c’était un truc de fermiers qui s’amusaient à shooter dans des cerceaux plus qu’autre chose. Nous, on a cherché à établir des règles. La première était que ça se joue sur un green. La seconde était le dress code. RTL7 a retransmis le tournoi : deux fois vingt-cinq minutes à la télévision avec un vrai présentateur, etc, donc ça semblait sérieux. Il fallait des tenues pour ça. Au golf, on n’a pas besoin de tirer dans un ballon, donc on porte des pantalons. Là, on a remplacé ça par des shorts de football, mais attention, des trucs à l’ancienne, classe. Et on a ajouté des casquettes, des bérets et des chaussettes typiques de golf. Une certaine idée du dandysme appliquée au foot. Aussi étonnant que ça puisse paraître, cette idée de mélange entre la tenue de golf et celle de football est restée et désormais, tous les joueurs de footgolf autour du monde s’habillent de cette façon. Je crois d’ailleurs que c’est une des raisons pour lesquelles les mecs viennent jouer au footgolf : pour avoir le style « funky golf » . Surtout les footballeurs, en fait. Je crois qu’ils aiment cette idée de look de country-club vu par le prisme du foot, un peu plus classieux que celui qu’ils ont l’habitude d’avoir sur les terrains de foot.

Ça n’a pas dû être facile de convaincre les propriétaires de terrains de golf de débarquer avec des ballons et shooter dans tous les sens.

Les joueurs savent quand même qu’il y a des règles à observer. Ils ne sont pas là à hurler, à cracher partout ou à fracasser des trucs dès qu’ils perdent. Ceci dit, les propriétaires de terrains de golf ne sont jamais vraiment contents de vous voir débarquer avec vos gros trous sur leurs greens. On a fait ça à Het Rijk à Nimègue, un circuit assez élégant. Au final, on s’est installés non par sur le green, mais sur ce qu’on appelle le « faux green » , le terrain d’entraînement. C’était bien mieux d’ailleurs, parce que l’herbe d’un green est beaucoup trop souple pour pratiquer le footgolf étant donné qu’une balle de golf est plus légère qu’un ballon. Pour revenir à la réticence des propriétaires de terrains de golf, je ne parle même pas du fait que majoritairement, les footballeurs ne sont pas issus de la même classe sociale. C’est la raison pour laquelle les tarifs sont si élevés pour les terrains de golf : pour garder les classes sociales basses à l’extérieur. Sauf que très rapidement, le footgolf s’est transformé en opportunité pour les propriétaires de maintenir leurs terrains de golf à flot en période de crise, notamment aux États-Unis. Probablement que le Old Course à St Andrews n’aura jamais de parcours de footgolf, mais en général, même les greens les plus chics s’ouvrent à ce sport.

En parlant de classe sociale, historiquement, le golf est un sport bourgeois et le foot, un sport ouvrier. Où se situe le footgolf ? Dans la middle class ?

Ça reste un sport universel. Mais si on devait détailler, je dirais qu’il n’y a pas tant de joueurs de golf exclusivement qui pratiquent le footgolf. En revanche, on a beaucoup de footballeurs. Si tu joues au golf, tu vas te rétrograder à jouer au footgolf, en tout cas aux yeux des autres golfeurs. Les golfeurs n’ont pas besoin du footgolf. Mais ça me va très bien comme ça.

D’autant que le footgolf ne se porte pas si mal : on compte une vingtaine de fédérations dans le monde entier et sa seconde Coupe du monde va se dérouler l’année prochaine. Ça vous fait quoi de savoir que votre idée a fait des petits ?

À dire vrai, on est très vite passés à autre chose avec mon associé parce que vous savez ce que c’est, vous devez vous concentrer sur différents projets en même temps. On a permis à deux, trois personnes d’agir sous le nom NFGB (nom de la Fédération néerlandaise de footgolf) et maintenant, ça pullule. Je trouve que ce qu’a mis en place Roberto Balestrini avec l’AFGL (la Fédération américaine de footgolf) est assez génial. Il fait un super travail de coordination : plus de trois cents greens sur quarante-deux États dans lesquels on pratique le footgolf. C’est pas mal.

Vous êtes passés à autre chose, mais vous avez quand même créé une Fédération internationale de footgolf depuis…

On s’est simplement demandé : « Où trouve-t-on toutes les fédérations sportives ? » À Genève. Bon, on va installer la nôtre à Genève alors. Comme la FIFA. Au moins, les gens ne se poseront pas de question ! Et puis, il était devenu nécessaire de créer cette institution pour avoir une autorité capable de réguler sur le principe ce sport, encore plus maintenant que certains gagnent de l’argent avec. Mais maintenant, je ne suis qu’un ambassadeur de cette institution.

Le footgolf, c’est un « cadeau » que vous avez fait aux gens, en quelque sorte ?

C’est surtout que tu DOIS le donner parce que si tu ne le donnes pas, les gens le prendront d’eux-mêmes ! (rires) Mais attention, je suis très heureux de ce que les gens en ont fait. Je n’irais pas jusqu’à dire que je suis fier de ce que les gens en ont fait parce que ce serait très arrogant. Mais c’est définitivement cool.

On a vu la première école de footgolf apparaître en Angleterre, sous l’égide de l’ancien joueur de Birmingham City, Bryan Hughes. L’ambition du footgolf, c’est de rester amateur ou d’en faire un sport professionnel ?

Je sais qu’aux États-Unis, certains joueurs remportent déjà de l’argent grâce à ce sport, mais ça reste anecdotique, du genre 5000€ la victoire. Mais c’est surtout une question de potentiel. Parce qu’il réunit deux des sports les plus riches du monde, le footgolf générera rapidement plus d’argent que certains sports en place depuis très longtemps comme le volley-ball.

À quoi attribuez-vous le succès du footgolf ?

Tu joues au foot, parfois ? En général, tu as tous ces trentenaires qui ne peuvent plus jouer au foot parce qu’ils ont des soucis aux genoux, aux hanches, parce qu’ils sont trop vieux ou trop gros ou tout simplement parce qu’ils n’ont plus le temps. Le footgolf, ça leur donne l’opportunité de shooter dans un ballon sans avoir à se rentrer les uns dans les autres. C’est une façon d’étendre leur temps de contact entre leur pied et un ballon, pour ainsi dire, de continuer à faire ce qu’ils adoraient faire auparavant.

C’est un sport de retraités, quoi !

De semi-retraités, oui ! Mais le golf, c’est aussi un sport de retraités ! (rires) Je pense aussi que c’est un moyen pour certaines personnes de faire ce qu’ils ne pourraient jamais faire normalement, c’est-à-dire entrer sur un green. Et qui sait, peut-être qu’ils se mettront au golf plus tard. Et puis, si tu joues au foot, tu n’as pas trop le temps de parler pendant que tu joues. Le footgolf, c’est plus social, tu peux discuter ou faire des jongles en attendant ton tour.

Vous qui êtes inventeur et ambassadeur de footgolf, est-ce que vous pratiquez votre sport ?

J’y ai joué trois fois et la dernière, c’était il y a quatre ans.

C’est peu, il faut bien le reconnaître…

C’est vrai. Mais quand est-ce que tu as vu Sepp Blatter en short en train de taper dans un ballon pour la dernière fois, toi ?
Edoardo Bove : et maintenant ?

Par Matthieu Rostac, à Amsterdam

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