- L'histoire des maillots
- Épisode 3
Marseille, l’or en blanc
Il est porté dans les stades, sur les terrains le dimanche, dans la cour de recré, dans la rue. Le maillot de foot est le signe de ralliement de tout supporter. Et chaque maillot a son histoire. Cette semaine, celui de l'Olympique de Marseille.
L’Olympique de Marseille n’est peut-être plus que l’ombre de lui-même, il n’en reste pas moins le club le plus populaire hors de nos frontières. Même quand il traverse une mauvaise passe, l’OM rayonne à l’international et fait rêver plus d’un joueur de football. Et comme tous les grands clubs, son maillot est aujourd’hui mythique. Parce qu’il évoque une histoire incroyable et un palmarès exceptionnel : neuf titres de champion de France, dix Coupes de France et, bien évidemment, une Ligue des champions. Sur le Vieux-Port comme partout ailleurs, le blanc et le ciel, c’est l’Olympique de Marseille et rien d’autre.
Histoire d’un maillot
En 1897, l’engouement national autour du football atteint la ville portuaire de Marseille. Cette année-là, beaucoup de clubs naissent et parmi eux se trouve l’ancêtre de l’OM, le Football Club de Marseille – qui léguera sa fameuse devise, « droit au but » à l’OM. Deux ans plus tard, en 1899, le FCM fusionne avec le club d’escrime L’Épée et devient, le 12 décembre 1900, l’Olympique de Marseille. Comme c’était souvent le cas à l’époque, l’OM est d’abord un club omnisports. On y trouve une section rugby, une athlétisme, une football et beaucoup d’autres. Tous les joueurs arborent la célèbre tunique blanche, et ce, dès la première saison du club.
Dans leurs beaux maillots blancs et leurs shorts noirs, les Olympiens s’inscrivent dès la saison 1899-1900 au championnat du littoral. Plus riche, et mieux organisé que ses principaux concurrents, l’Union sportive Phocéenne et le nouveau Sporting Club, l’OM remporte le championnat local pour sa toute première participation. Mieux, le club du magnat des sports, René Dufaure de Montmirail, remporte presque chaque édition de cette compétition jusqu’en 1908 (pas de victoire en 1904). En à peine dix ans, Marseille est blanche.
Pierre de Coubertin et l’olympisme à l’honneur
En 1896, Pierre de Coubertin relance les Jeux olympiques à Athènes, les premiers de l’ère moderne, plus d’un millénaire après leur abolition. Outre sa désormais fameuse devise « L’important dans la vie, ce n’est pas le triomphe, mais le combat ; l’essentiel, ce n’est pas d’avoir vaincu, mais de s’être bien battu » (Pierre de Coubertin n’a jamais dit « l’important, c’est de participer » ), l’aristocrate français exige que tous les athlètes se présentent aux JO en blanc. Pourquoi ? Parce que le blanc représente la pureté de l’olympisme. Amoureux des valeurs prônées par Pierre de Coubertin, René Dufaure de Montmirail décide d’imposer le blanc à ses Olympiens également.
Certains historiens avancent également un argument économique : créer un jeu de maillots blancs revient forcément moins cher que de créer un jeu de maillots colorés. Jusqu’au début des années 1920, les Marseillais ne jouent cependant pas qu’en blanc. Pour rendre hommage au Football Club de Marseille, d’où viennent beaucoup de dirigeants et joueurs de l’OM, René Dufaure de Montmirail impose des shorts noirs à ses athlètes. Logique, puisque le FCM jouait en noir. Pour ne pas se transformer en publicités pour lessive, les joueurs de l’OM optent rapidement pour des chaussettes bleues. Quoi de plus logique, une fois encore, que d’adopter la deuxième couleur de la ville, comme en atteste les armoiries de la ville : « Le blason d’argent à la croix d’azur. » À cette époque, beaucoup l’ignorent, mais le blanc et le ciel, à Marseille, deviendront plus que de simples couleurs.
Pendant longtemps, un simple liseré bleu ciel vient détourer le col des maillots. En 1969, pour la toute première fois de l’histoire de l’OM, le logo du Coq Sportif, équipementier du club, apparaît sur le maillot. Deux ans plus tard, le premier sponsor apparaît sur le devant du maillot. Il est d’ailleurs… imposant. Jamais, dans son histoire, l’Olympique de Marseille n’a osé trahir ses couleurs (sur ses maillots à domicile). À une exception près. En 1969, l’OM reçoit l’OL. À l’époque, l’équipe qui recevait devait changer de tenue en cas de risque de confusion des couleurs. L’arbitre ordonne alors aux Marseillais d’enfiler des tuniques rouges et des shorts blancs, puisque les Lyonnais jouent eux en maillots blancs et shorts rouges. Au final, incompréhension sur la pelouse, forcément, et l’arbitre ordonne aux Marseillais d’enfiler une tunique bleue. Un joyeux bazar et des Marseillais en rouge : pas besoin d’attendre 2015 pour voir de l’ambiance dans un match entre les deux olympiques.
Maillot mythique
À Marseille pas de doute, le maillot qui a fait rêver plus que tous les autres est bien évidemment celui arboré pour la finale de la Coupe des clubs champions, en 1993. Cette année-là, pas de croix – qui vient encore une fois des armoiries de la ville, la croix ayant été adoptée au temps des croisades –, mais trois bandes azur au niveau de l’épaule droite et sur le short. Un col tricolore, simple, un écusson magnifiquement brodé et un équipementier – Adidas – discret au niveau du col. Au-delà de ce qu’il représente, ce maillot est surtout une œuvre d’art qui a le mérite de ne pas être polluée par un sponsor. Un vrai supporter marseillais pourrait reconnaître ce maillot au premier coup d’œil. Basile Boli aussi, logiquement.
Maillots extérieurs et collectors
Pendant très longtemps, les Marseillais n’osaient pas toucher au bleu de leur deuxième jeu de maillots. En fait, le maillot extérieur de l’OM a longtemps été le « négatif » du maillot domicile, avant que quelques hommes guidés par les lois du marketing ne décident de tenter quelques petites folies pas toujours bien reçues par le public.
Lors de la saison 1998/1999, l’OM crée un maillot third pour fêter le centenaire du club. Pour la première fois de leur histoire, les joueurs portent un maillot qui n’est ni bleu, ni blanc, ni même rouge, mais doré. Entièrement doré. Une petite polémique éclate alors. La nationalité du sponsor Ericsson, une marque suédoise, aurait-elle influencé ce choix ?
D’une manière globale, les années 2000 n’ont pas été une franche réussite pour les maillots extérieurs et third de l’OM (pour être honnête, elles ne l’ont été pour aucun club français). Pour les coupes d’Europe, les Marseillais optent régulièrement pour des tuniques grises. La palme du maillot third le plus laid revient tout de même à la tunique de la saison 2004/2005 : du noir, du jaune, des formes géométriques et un sponsor bien nul pour un maillot tout pourri. En revanche, le maillot extérieur des saisons 2001/2002 et 2002/2003, aussi appelé le maillot « Khalifa Airways » , a fait un tabac à Marseille et à Paris. Car oui, beaucoup de Parisiens sont supporters marseillais.
Ils se sont inspirés du maillot de l’Olympique de Marseille
Si le maillot de l’Olympique de Marseille a fait rêver plus d’un amateur de football, difficile cependant d’affirmer qu’un club professionnel s’en est inspiré pour son propre jeu de tuniques. Certes, le blanc est la couleur d’une multitude d’équipes, mais aucune d’elles n’a jamais affirmé l’avoir choisi en hommage à l’Olympique de Marseille. En football, tout du moins. Le Stade phocéen, équipe de rugby basée à Marseille, a en revanche repris les couleurs du club, le ciel et le blanc, et le logo (la croix d’azur).
Par Gabriel Cnudde