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  • France – Ligue 1 – 21e journée – Rennes/Évian TG

Mais pourquoi les Pinault ne lâchent pas plus de sous pour le Stade rennais ?

Par Régis Delanoë, à Rennes
7 minutes
Mais pourquoi les Pinault ne lâchent pas plus de sous pour le Stade rennais ?

Troisième fortune française et cinquante-troisième mondiale, la famille Pinault, propriétaire du Stade rennais, possède en théorie plus d’argent que Marseille, Monaco, voire même que le PSG pour faire briller son club. Depuis une dizaine d’années, elle fait pourtant surtout preuve d’une certaine frilosité qui peut étonner et susciter la frustration des supporters. Mais pourquoi diable le père François et le fiston François-Henri n’investissent-ils pas plus ? Tentative d’explications.

Parce qu’ils ont été échaudés

« Pinault devrait se lâcher ! » Le cri du cœur est signé Kaba Diawara, récemment interrogé par 20 Minutes. Il résume le sentiment général d’une majorité de supporters et d’observateurs du Stade rennais depuis quelques années. Mais c’est intéressant que ce soit l’attaquant franco-guinéen aujourd’hui retraité qui fasse ce commentaire, lui qui a marqué le 9 mai 1998 l’un des buts les plus importants de l’histoire du club. C’était face à Toulouse et il permettait d’assurer le maintien en élite du Stade et à François Pinault de valider son opération rachat. Partenaire sponsor à partir de 1993, l’homme d’affaires breton se laisse à l’époque convaincre par le maire de Rennes Edmond Hervé de racheter l’ensemble des actions du club, pour en devenir le seul et unique boss. Un rôle qu’il apprécie et qu’il maîtrise, lui le self-made-man non bachelier entré dans les ordres du business dans les années 60 en rachetant la scierie de son beau-père. En 1974, son compte en banque commence à aligner les zéros en spéculant intelligemment sur le marché du sucre. L’empire Pinault est en marche. Il devient Pinault-Printemps en 1992, puis Pinault-Printemps-Redoute en 1994 par le biais de rachats. En 1994 toujours, il acquiert la Fnac, en 1998, Christie’s, etc. Et c’est donc cet étonnant cow-boy du « phare-ouest » qui déboule dans le monde du football au tournant du millénaire. Le mec a les bourses pleines, il est chaud-patate et signe rapidement de gros chèques en se disant qu’il n’y a que comme ça qu’on peut composer des équipes capables de gagner des titres. À l’été 2000, il fait de Rennes le sixième club le plus dépensier d’Europe, avec l’équivalent de 58 millions d’euros déboursés sur le marché des transferts, dont 21 millions rien que pour Severino Lucas et 12 pour Mario Turdo. Pour zéro résultat sportif. Le flop est violent. Si violent que Pinault, bien qu’il ne l’ait jamais publiquement reconnu, s’est certainement dit à ce moment-là qu’on ne l’y reprendrait plus à faire son malin dans l’achat de joueurs. Fini de jouer au poker, dès le début des années 2000 il commence à lâcher l’affaire au fiston François-Henri, lequel engage Pierre Dréossi, un profil de comptable bon père de famille, qui occupe différents postes au club avant d’en devenir manager général jusqu’au printemps dernier. Place à la rigueur.

Parce qu’ils préfèrent miser sur le long terme

Passées les premières saisons un peu folles de l’ère Pinault, la stratégie change donc radicalement, avec une balance de transferts à l’équilibre et une grille de salaires stricte. Père puis fils décident aussi de miser sur une valeur sûre en matière d’investissement : l’immobilier. La bonne vieille pierre qui ne déçoit pas. Moins que les étoiles filantes sud-américaines en tout cas. Grâce à leur implantation dans le club et à l’assise financière qu’ils apportent, la rénovation du stade de la route de Lorient est votée par la mairie. Elle coûtera près de 40 millions d’euros et permet aujourd’hui aux Rouge et Noir de posséder un joli stade, moderne et aux bonnes proportions, que peuvent jalouser pas mal de concurrents de Ligue 1. Bâtir sur le long terme, c’est aussi se doter d’un centre d’entraînement performant. La Piverdière est inaugurée en juin 2000 par François Pinault himself. C’est l’un des meilleurs de France. Et puis bien sûr, il y a le centre de formation. Dans une région d’agroalimentaire comme la Bretagne, on tient l’élevage en haute estime. En 2002, le budget alloué à la formation est quadruplé pour atteindre près de 10 % du budget du club. Résultat, le centre de formation du Stade rennais est élu meilleur de France entre 2006 et 2011 et reste toujours l’un des plus cotés. Le constat objectif à déduire de ceci est le suivant : ok le Stade rennais n’a rien gagné depuis plus de 40 ans, ok l’armoire à trophées n’a pas grossi malgré l’arrivée d’un actionnaire milliardaire à la tête du club, ok les Pinault ne sont plus décidés à s’exciter en matière de recrutement, mais au moins ils ont permis au Stade rennais de disposer désormais de structures solides pour durer en élite.

Parce qu’ils n’en ont pas besoin

Le dernier classement Challenge des personnalités françaises les plus fortunées a de quoi faire fantasmer les supporters du club breton. On y apprend que François Pinault possède une fortune estimée à 11,3 milliards d’euros. Il est seulement devancé par Liliane Bettencourt et Bernard Arnault. D’après le classement mondial établi par Forbes, c’est plus que ce que détient le proprio flambeur de l’AS Monaco, le Russe Dmitry Rybolovlev (9,5 milliards). Plus aussi que le boss du PSG Tamim ben Hamad Al Thani (2,5 milliards). Et plus que Margarita Louis-Dreyfus, la miss cocktail de l’OM (5,5 milliards). Bien plus que tout le monde dans la France du foot. Potentiellement, Pinault possèderait donc de quoi recruter les meilleurs joueurs du monde ? Pas si sûr en fait, car sa fortune est constituée majoritairement d’actifs et non de liquidités. Et quand bien même le daron et le fiston – le premier reste toujours officiellement le propriétaire, mais il a depuis quelques années déjà confié les rênes du club à Junior via la holding Artémis – auraient la possibilité de faire venir de gros noms, pourquoi le feraient-ils ? Les Bretons sont déjà bien implantés sur le territoire, avec des entreprises connues et reconnues. Et puis, ils ont des réseaux très puissants et très anciens dans l’Hexagone et dans tous les pays occidentaux, que ce soit aux niveaux économique, politique ou même culturel. Rybolovlev et les Qataris de la capitale, eux, n’en sont pas au même stade. Ils ont du chemin à parcourir dans le cash-game, et quoi de mieux que le football pour se faire une vitrine toute belle ? C’est un accélérateur unique pour s’établir le plus vite possible en France et en Europe, ce qu’ils ont bien compris. Investir dans le football, c’est pour eux stratégique, alors que pour les Pinault, il s’agirait d’une action plus désintéressée, ce qu’affirmait François-Henri lors d’une rare interview accordée en 2012 pour l’ouvrage Supporters du Stade rennais. « Notre démarche n’a rien à voir avec une affaire financière, disait-il. Il s’agit d’une question de passion. C’est presque du mécénat. »

Parce qu’ils n’en ont pas envie

Dans ce même bouquin, le fils Pinault expliquait aussi ceci : « Notre démarche n’est pas la même que celle de M. Abramovitch avec Chelsea. On n’a pas acheté le Stade rennais pour en faire le meilleur club. En 1998, mon père décide d’investir dans le Stade rennais. Sa volonté ? Redonner à la Bretagne ce qu’elle nous a donné. Cette région mérite une équipe de foot ambitieuse qui procure de la fierté à ses habitants. » Des propos qui peuvent un poil décevoir, mais qui ont le mérite d’être clairs. Le Stade rennais pour les Pinault, c’est un don offert à leurs compatriotes adorateurs de la galette-saucisse. Ni plus, ni moins. Ils ont sauvé un club en grande précarité sportive et financière dans les années 90, en le dotant d’une assise lui permettant de s’installer durablement dans le paysage footballistique français. Et pour eux, c’est déjà pas mal. D’une certaine manière, ils ont raison. Grâce à eux, l’équipe bretonne n’a pas de souci à se faire pour son avenir proche comme lointain. Plus de crainte de descendre en deuxième division, plus de crainte non plus de boucler le budget d’une saison. La famille Pinault offre une gracieuse tutelle. Et tant pis pour la frustration que cette situation suscite auprès des supporters. La priorité de François, c’est sa collection d’œuvres d’art contemporain. Celle de François-Henri, c’est le déploiement du groupe Pinault, renommé groupe Kering, dans le fructueux secteur du luxe. Le football ? Hé bien le football, c’est une passion. Un loisir. Pas nécessairement une obsession ni une priorité dans laquelle il faudrait faire des folies.

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