Little Odessa

Les Ukrainiens sont en colère, mais pas tous pour les mêmes raisons. À Odessa, une ville fidèle à Viktor Ianoukovitch, il y a peu de chances que la violence ayant marqué Kiev ces derniers jours se propage, mais on a assez peu apprécié que Rémi Garde fasse venir son équipe B pour le match aller des 16es de finale de l’Europa League. « Il y a quelques jours, j’aurais pensé que Lyon gagnerait sans problème, confie Alexandre Gapomnenko, un journaliste du magazine ukrainien Football. Mais vu l’équipe qui viendra, on a de bonnes chances de faire un bon résultat. » Le club de la mer Noire n’est pourtant pas le plus réputé d’Ukraine. Sans gros moyens, il n’a pas à sa tête les oligarques du Metalist Kharkiv ou du Chakhtar Donetsk, mais un député local du parti au pouvoir et pour sa première participation à des 16es de finale de Coupe d’Europe, le seul nom connu dans nos contrées est celui de Franck Dja Djédjé. Le principal atout des Ukrainiens, en fait, s’apelle Roman Grigorchiuk. « C’est le meilleur élément de l’équipe, et le meilleur entraîneur d’Ukraine » , note Grigoriy Zaydman, lui aussi journaliste à Football. Avant son arrivée à Odessa, Roman Grigorchiuk n’avait à son palmarès que quelques titres de champion de Lettonie. Mais on lui a donné le temps de construire une équipe à son image à Odessa. « Il a fait monter le club en première division, puis l’a installé en haut du tableau et lui a fait gagner la Coupe d’Ukraine. Le succès d’Odessa, c’est dû au travail du coach et à l’autorité qu’il a sur ses joueurs. Il sait en tirer le meilleur parce qu’ils croient vraiment en lui, continue Grigoriy Zaydman. Il est intelligent, compétent et vaut bien plus que l’Europa League. Il pourrait entraîner une équipe jouant régulièrement la Ligue des champions. » Et le principal point fort de l’entraîneur ukrainien, assurent les connaisseurs, c’est la tactique. « On fait constamment des mises au point. Il utilise beaucoup la vidéo pour nous expliquer ce qu’il attend » , explique d’ailleurs Franck Dja Djédjé.

Le frère de Riera

Sur le terrain, le Tchernomorets Odessa est avant tout une équipe de contre-attaque, « bien organisée, qui prend peu de cartons et qui doit s’adapter à son adversaire » . Le club possède la meilleure défense du championnat ukrainien et « la meilleure paire de défenseurs centraux du pays avec Pablo Fontanello et Markus Berger » , selon Grigoriy Fraydman. Pour le reste, pas de stars dans cette équipe. Le seul joueur expérimenté en Coupe d’Europe est l’ancien milieu du Chakhtar Donetsk Oleksei Gai, vainqueur de l’Europa League en 2009. Et son meilleur joueur Kiril Kovalchiuk, « un milieu défensif qui perd peu la balle, très bon dans le jeu long » . Et Franck Dja Djédjé dans tout ça ? « Il est devenu un de nos meilleurs joueurs. Il a eu un peu de difficultés au début, mais s’est amélioré physiquement. Il ne marque pas beaucoup, mais ses buts sont importants ! » C’est d’ailleurs grâce au Franco-Ivoirien que le Tchernomorets Odessa s’est qualifié, sur le terrain du PSV Eindhoven. Contre Lyon, le club sera toutefois privé de l’Espagnol Sito Riera, le frère de l’ancien ailier gauche bordelais, coupable d’un pétage de plomb lui ayant valu 5 matchs de suspension.

« La trêve ne nous dérange pas trop »

Qualifié de dernière minute, grâce à deux victoires dans les deux derniers matchs de poule, le Tchernomorets abordera ce match sans beaucoup de pression. « C’est un petit miracle d’être là » , sourit Alexandre Gaponenko, qui n’oublie pas que le Tchernomorets avait dû passer par les tirs au but pour se qualifier lors des barrages, contre les Albanais de Skenderbeu. Alors forcémment, l’idée d’un nouvel exploit fait son chemin. « Les attentes sont énormes et le stade sera rempli ! » , reprend Grigoriy Zaydman. Reste une question : l’état de forme du Tchernomorets, pour qui ce 16e de finale sera un match de reprise après trois mois de trêve. Une coupure qui handicape habituellement les clubs russes ou ukrainiens en Coupe d’Europe, mais qui ne fait pas peur à Franck Dja Djédjé : « On a fait un mois de stage en Turquie, avec presque un match amical tous les trois jours, donc côté physique, on sera prêts ! Honnêtement, la trêve ne nous dérange pas trop et on sera prêts. » Le message est passé.