- Ligue des champions
- 8e de finale aller
- Valence/PSG (1-2)
Les leçons tactiques de Valence-PSG
Opposé à Ernesto Valverde, Carlo Ancelotti avait parlé d'une « rencontre tactique ». Une sorte de partie d'échecs avec un peu plus de spectateurs et un peu plus de physique. Hier soir, c'était au tour du PSG de jouer avec les pions noirs.
Au milieu, il y a le ballon. D’un côté, tu ne peux pas marquer sans. De l’autre, si tu ne l’as pas, tu ne peux pas le perdre. Il faut choisir. Faire le match, ou laisser l’initiative à l’adversaire ? En conférence de presse, Ancelotti avait fait un joli coup de bluff : « Je pense que nous aurons le ballon » . Valence n’était pas obligé. Mais les Chés jouaient à la maison, et El Valencia reste un club espagnol. Valverde n’a pas pu s’en empêcher, et a choisi de jouer la partie d’échecs avec les pièces blanches. Et le devoir de prendre l’initiative…
Les deux systèmes
Ancelotti conserve son 4-4-2 adaptable, barre le nom de Ménez et choisit Verratti plutôt que Chantôme. Face à ça, on aurait imaginé Valence avec un 4-4-1-1 contraignant pour Lucas et Pastore, laissant Jonas-Soldado travailler devant. Mais les absences de Mathieu et Cissokho compliquent la donne. L’UEFA nous annonce un 4-3-3 avec Tino Costa-Parejo-Ever Banega au milieu. Mais entre un Banega tout-terrain censé soutenir les offensives dans un 4-2-3-1 ou le déploiement d’un 4-3-2-1 favorisant les montées de Pereira et de Guardado, le dessin est brouillon. Valverde fait le choix du contrôle du milieu, mais se retrouve avec Jonas et Feghouli pour défendre les départs parisiens sur les côtés. Surtout, le couloir gauche Jonas-Guardado-R. Costa est faible défensivement. Les deux buts passeront par là.
Le PSG tisse sa toile…
Si Valence semble sans idée, c’est surtout parce que le PSG se mue en une remarquable organisation défensive. Le milieu à trois des Blancs laisse supposer un passage dans l’axe, mais tombe rapidement sur Matuidi et Verratti. Quand ce n’est pas Blaise qui mange le ballon, c’est Verratti qui le cache. Faut-il passer à gauche ? Mission impossible : Lucas ne s’arrête pas de défendre. Lorsque Guardado prend le couloir, c’est le Brésilien qui le suit jusqu’au poteau de corner et permet à Jallet de venir aider les centraux dans la surface. Après plusieurs échecs, passer à droite du côté de Pastore semble devenir une évidence, et Joao Pereira commence à se montrer. Mais Pastore est discipliné, fait preuve d’agressivité et vient toujours aider Maxwell. Sans oublier de délivrer une passe décisive (du talon, ça pourrait compter double) et un but. Valence se perd.
Désespéré, Tino Costa se voit limité à orienter le jeu sans réussir à l’inventer. Le cerveau valencien fait de la géométrie au milieu, vers la gauche, vers la droite, tente en vain de joindre directement Soldado. Cela pourrait marcher, mais Sakho et Alex vissent le Capitaine, et l’habituel hyperactif Banega ne sort pas de la poche de Matuidi. Chaque attaque des pions blancs semble prévue, anticipée. Le travail sans ballon de Pastore, Lucas et Lavezzi est fantastique. Une grande prestation collective. Qu’aurait donné le pressing de Matuidi sans celui de Lavezzi ? Qu’auraient été les courses de Lavezzi et Lucas sans la disponibilité de Zlatan ? Que seraient devenus Alex et Sakho sans Matuidi ? Ce PSG est à l’aise, sans pour autant avoir besoin de sortir de ses bases. Verratti est le symbole de cette maîtrise : l’Italien transforme une équipe qui défend sans contrôle en ce PSG qui contrôle en défendant. A la télévision espagnole, on l’appelle déjà « Don Verratti » .
…et Lavezzi vient se servir
Et c’est ici qu’intervient Lavezzi. El Pocho n’est pas seulement le premier buteur : le second but provient aussi de l’un de ses infatigables pressings. L’Argentin est l’homme du match. L’intensité du PSG, c’est lui. Avec acharnement, il vient agresser le pauvre Parejo, qui n’est plus vraiment celui que l’on avait connu à Getafe. Entre un PSG solide et un PSG conquérant, Lavezzi fait la différence. A tel point que Zlatan se met au pressing. Résultat ? Si chaque coup de Valence est anticipé, Lavezzi empêche même les Espagnols de penser au prochain. Sa présence devient un insupportable tic-tac au Mestalla. La possession espagnole (64%) est broyée : peu de temps pour penser, et par conséquent peu de réflexions pertinentes.
Ancelotti répond à Valverde
Canales pour un Banega décevant, et Valdez pour Jonas. C’est intelligent : Valverde souhaite donner plus de temps à son milieu pour penser chaque action, faire circuler plus longtemps et plus vite, et espérer que la présence de Valdez libère des espaces dans la surface. Il reste plus de 40 minutes à jouer. Ancelotti répond avec Chantôme pour Lucas (blessé). Le PSG devient plus vulnérable sur son côté droit car Chantôme n’écarte pas autant le terrain que le Brésilien, mais le Français limite les mouvements d’un bon Canales. Les contre-attaques défilent, malgré l’entrée tardive de Ménez. Paris doit marquer ce troisième but.
Les limites de ce PSG
Il y en a trois. D’une, quand la ligne Lavezzi-Zlatan est sautée et que Matuidi-Verratti ne fait pas le choix de se jeter dans les pieds de l’adversaire, le 4-4-2 parisien devient très attentiste. Le travail sans ballon de Lucas, Lavezzi et Pastore est bien la première condition de réussite de la tactique entrevue hier soir, et il n’est pas dit qu’il sera toujours aussi bon. De deux, le PSG a aimé se précipiter hier soir. Des dégagements de Sirigu aux certaines contre-attaques jetées à la poubelle, Paris aurait pu mieux gérer la possession à certains moments. De trois, l’expérience en C1, évidemment. Un but sur coup de pied arrêté, le rouge de Ibra, la suspension de Verratti… Le PSG avait fait le plus dur en gérant le temps faible de la 75e minute (tir de Valdez et pénalty demandé par Valence). Attention au retour. Bilan provisoire de la partie : si Paris semble avoir détruit toutes les pièces lourdes de Valence, les Espagnols ont réussi à s’emparer de la Reine parisienne.
Par Markus Kaufmann
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