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Les 32 slogans du Mondial à la loupe
Après sélection du public sur le site de la FIFA, les slogans qui seront affichés sur les bus des 32 engagés pour le Mondial ont été dévoilés. Entre choix discutables et maldresses verbales, ces accroches n'ont pas manqué de faire réagir dans les gazettes internationales. Mais qu'en pensent les spécialistes de la communication ? Eléments de réponse avec Frédéric Bricard, concepteur/rédacteur dans l'agence Mégalo et Company et responsable des campagnes pub du PSG et de l'EDF. Sans oublier nos propositions originales.
France : Impossible n’est pas français « Pour le coup, c’est guerrier si les gens connaissent la célèbre citation de Napoléon. Si ce n’est pas le cas, la phrase peut quand même être prise comme une maxime. D’ailleurs, elle ressemble beaucoup à l’ancienne signature d’Adidas« Impossible is nothing ». Il y a un côtémade inFrance, fierté nationale, super actuel. » Slogan alternatf : L’impossible est le refuge des poltrons
Algérie : Les guerriers du désert au Brésil « On est dans le registre classique de la guerre, du combat ultime. Il y a un risque avec ce vocabulaire guerrier, généralement on l’évoque sans utiliser de mots trop premier degré. Et puis le désert, c’est un peu vide, ça ne représente pas le peuple. C’est presque un message folklorique que nous aurions utilisé si l’on avait voulu les caricaturer, qu’une agence de comm’ française aurait pu sortir. » Slogan alternatif : One, two, three, vivao l’Algiri !
Allemagne : Une nation, une équipe, un rêve « Ah c’est très allemand ! On peut toujours entendre plein de choses avec l’Allemagne. Il y a une métrique qui rappelle un peu les slogans de la Seconde Guerre mondiale, après j’ai peut-être l’esprit mal tourné. Mais il y a un côté martial, militaire dans la façon dont c’est agencé, rythmé. Le terme nation phagocyte tout le reste. » Slogan alternatif : Get Löw
Angleterre : Le rêve d’une équipe, les battements de cœur de millions de fans !! « On est là encore dans l’enjeu supra sportif, le grand rendez-vous patriotique, la grande messe nationale. Cependant, on n’est pas dans le registre guerrier, on est dans la passion et dans l’affect, ce qui pour moi est le bon positionnement. » Slogan alternatif : Le rêve d’une équipe, la crise de foie de millions de fans !!
Australie : Socceroos, faisons un bond dans l’histoire « Il y a un appel au rassemblement et à l’action : « Faisons ». Il y a un nouvel emploi du registre animalier pour un impact large et populaire. Tout le monde aime les kangourous ! » Slogan alternatif : Soccerroostes, faisons un bond vers chez nous
Belgique : Attendez-vous à l’impossible « J’aurais dit : « Attendez vous à l’inattendu. »On est sur leteasing, la bande-annonce, la création d’une attente, le suspense… et la promesse d’un exploit potentiel. Ça laisse une ouverture dans un monde où tout est écrit, où on connaît les puissants, où les scénarios semblent figés. » Slogan alternatif : Impossible est belge. D’office.
Bosnie-Herzégovine : Dragons dans les cœurs, dragons sur le terrain « Ils jouent sur leur emblème, on réaffirme le côté blason du pays en insistant deux fois sur le mot. On parle du peuple avec le« cœur », on parle des joueurs avec le« terrain », et on l’unit autour du dragon. » Slogan alternatif : Cœur de dragon
Brésil : Préparez-vous, la sixième arrive ! « C’est déjà plus sympa, une espèce de défi. C’est très accrocheur, interpellant, c’est un clin d’œil. Je ne trouve même pas ça trop présomptueux, on imagine le recul et le second degré, une sorte de provocation gentille. Et puis ça réveille les souvenirs de toutes les générations, du plus petit au plus vieux. » Slogan alternatif : Préparez-vous, les JO arrivent !
Cameroun : Un lion demeure un lion « Le lion est le roi des animaux, personne ne doit remettre en cause sa suprématie. On est dans l’image, la légende, la fable, la parole d’un sage. » Slogan alternatif : Il est pas moooort, le Samuel
Chili : Chi, Chi, Chi, Le, Le, Le, allez le Chili « J’imagine qu’une chanson viendra à côté. C’est on ne peut plus populaire, un chant de supporter. Cela ressemble un peu aux vieilles pubs des années 80 quand les publicitaires essayaient de trouver des accroches avec les noms des marques, quelque chose qui ne se fait plus maintenant. » Slogan alternatif : Chi, Chi, Chi, Le, Le, Le, Con Carne.
Colombie : Ce n’est pas une équipe qui voyage, c’est tout un pays « On retrouve le duo supporter-joueur, un grand classique pour faire vibrer la fibre patriotique. Le grand enjeu, c’est l’union sacrée. Ce n’est pas 11 hommes qui entrent sur le terrain, mais toute la population. C’est une forme d’hyperbole, on affirme ici que c’est plus qu’un match, plus qu’une compétition, c’est le destin de tout un pays. » Slogan alternatif : Sur les traces de l’histoire
Costa Rica : Ma passion est le football, ma force les supporters, ma fierté le Costa Rica. « Ah oui, là ils ont essayé de tout mettre. Mais généralement quand il y a tout, c’est qu’il n’y a rien. C’est l’exemple même de la phrase consensuelle. Ça aurait pu être un briefing client : « Je veux que vous me parliez des supporters, de football et du Costa Rica. »On se retrouve avec une phrase marketing qui n’a pas été travaillée, twistée, sans expression forte ou jeu de mots. » Slogan alternatif : Ma passion est le grain, ma force la torréfaction, ma fierté le café.
Côte d’Ivoire : Les Éléphants à la conquête du Brésil « Le mot conquête implique une stratégie, un avancement de pions. Mais ça reste dans le champ lexical de la guerre. Il y a un côté « on va prendre de nouvelles terres » qui, allié à l’éléphant, n’est pas désagréable. » Slogan alternatif : Des Éléphants sans défense
Croatie : Avec du feu dans nos cœurs, la Croatie est unie « Le feu représente la passion, l’embrasement populaire. La phrase est passe-partout et l’on aurait pu la coller à n’importe quel événement. Cela renvoie également à l’histoire du pays, d’où un côté un peutouchy, pas assez incarné dans le football. » Slogan alternatif : Avec Suker dans nos cœurs, sans Thuram dans nos vies
Équateur : Un engagement, une passion, un seul cœur, on est avec toi Équateur « Un peu comme pour le Costa Rica, c’est une longue litanie. Ici, on parle à l’Équateur comme si c’était une personne (« avec toi »), un ami, un proche. Il y a une sorte de naïveté sympathique, c’est un peu plus chamallow, bisounours. Même si le début de la phrase est un peu sentencieux, la fin est plus accrocheuse. » Slogan alternatif : Quito double
Espagne : Dans notre cœur, la passion d’un champion « On affirme directement ce côté champion. On n’est pas la Côte d’Ivoire, on a un passé derrière nous, il faut le rappeler. Il faut jouer sur l’inconscient collectif des gens. Plutôt que de partir à l’aventure, il vaut mieux capitaliser sur les succès passés et réveiller des flammes qui ont déjà brûlé. » Slogan alternatif : Dans nos veines, la pression d’une seringue
Ghana : Black Stars : Là pour illuminer le Brésil « Si le jeu de mot est bon, il n’y a pas de problème. Après c’est difficile de trouver un jeu de mots intelligent et qui puisse plaire au plus grand nombre. Mais pourquoi pas, cela désacralise le foot, même si je ne suis pas un grand fan de celui-là. » Slogan alternatif : Black Stars : Là pour massacrer Suárez
Grèce : Les héros jouent comme les Grecs « Il y a une perspective un peu sacrée, divine de la compétition. Le mot héros n’est pas présent dans les autres signatures et revêt une connotation très positive, mais sa collision avec l’histoire du pays peut aussi être clichée. » Slogan alternatif : La zone Euro joue sans les Grecs
Honduras : Nous sommes un peuple, une nation, avec 5 étoiles sur le cœur « Le mot cœur revient avec insistance, c’est un poncif qui joue très bien avec la fibre patriotique. » Slogan alternatif : 5 étoiles sur le cœur, 0 sur le maillot
Iran : L’honneur de Perse « C’est un slogan assez puissant, engageant mais aussi un peu flippant du coup. En cas de défaite, c’est le déshonneur qui les attend. Ça rappelle un peu la dictature coréenne où les mecs se font zigouiller s’ils ne gagnent pas le match. Là, c’est mettre la barre un peu haut. » Slogan alternatif : Mahmoud, la peur de perdre
Italie : Peignons de bleu le rêve mondial « J’aime bien l’image poétique, et ce chic italien qui fait référence aux peintres du passé. Après le« rêve mondial »fait un peu totalitaire, ce qui n’est pas étonnant étant donné que le foot est une religion là-bas. » Slogan alternatif : Peignons nos cheveux, le rêve de Zidane
Japon : Samouraï, l’heure de combattre est arrivée « Là on y est ! Il n’y a aucun second degré, on est hyper frontal. Ça pourrait être un slogan d’avant guerre, sans nuance ni distanciation. On ne peut pas appeler les joueurs à se transformer en samouraï dans ce qui reste avant tout un jeu. Une fois de plus, culturellement, ce n’est peut-être pas choquant pour eux, mais je trouve ça un peu fort. Imaginez en France si l’on disait : « Poilus, l’heure de combattre est arrivée. » » Slogan alternatif : San Ku Kaï, c’est la bataille
Mexique : Pour toujours unis, pour toujours aztèques « Dans une compétition où des nations rencontrent des nations, on essaie toujours de faire prévaloir sa supériorité. Pas étonnant dès lors que le Mexique s’en réfère aux Aztèques, un peuple qui en son temps était en avance. » Slogan alternatif : Par amour de la moustache
Nigeria : On ne peut gagner qu’ensemble « C’est clairement une totologie. Forcément, dans un sport collectif, il faut jouer avec ses partenaires. C’est une vérité que l’on connaît tous, inscrite dans les règles du football, mais je trouve ça pas mal. C’est presque une maxime, comme en pub, certains réinventent des vérités. » Slogan alternatif : #BringTheCupBack
Pays-Bas : Les vrais hommes sont vêtus d’orange « Jouer la couleur, d’accord. Ensuite, je suis gêné par« Les vrais hommes ». La technique d’affirmer comme cela des vérités, ok, mais là c’est facilement démontable, c’est creux. Il y a aussi un côté macho qui pourrait même perdre le public féminin. Ça ressemble à la pub Gilette, « Pour nous les hommes ». » Slogan alternatif : Les vrais hommes perdent en finale
Portugal : Le passé est l’histoire, le futur la victoire « Il y a un côté assez cérébral, assez froid. C’est un message qui ne sent pas la chair, les gens qui crient, l’encouragement. Le slogan est un peu désincarné. » Slogan alternatif : Le ciment d’une équipe, l’édifice d’un pays
République de Corée : Profitez, ce sont les Rouges ! « Le message est assez bizarre. Profitez parce que vous ne les verrez plus ? Profitez car il va y avoir du spectacle ? Il y a peut-être une référence à un pays qui n’est pas si libre qu’il en à l’air et auquel la Coupe du monde donne l’occasion de se lâcher pendant un mois. » Slogan alternatif : Profitez, ce sont les Jaunes !
Russie : Personne ne peut nous attraper « C’est une démonstration de force et vu le contexte actuel, c’est une maladresse. On dit clairement « Faites votre truc, nous on fait notre chemin de notre côté en solo. »Cela pourrait être un titre d’actualité nationale. » Slogan alternatif : Personne ne peut nous attraper, même l’ONU
Suisse : Destination finale : 13/07/2014 Maracanã « C’est très présomptueux de fixer un rendez-vous comme ça. Il n’y a pas de recul, de second degré. On ne demande même pas aux gens de se mobiliser. Et le jour où ils vont perdre, la destination finale ce sera le retour à la maison. » Slogan alternatif : Destination finale : 1/07/2014 Genève
Uruguay : 3 millions de rêves, allez l’Uruguay ! « C’est encore un message suprême d’unification du peuple. Le fait de chiffrer permet de toucher tout le monde. Le boulanger, le facteur du coin vont être autant touchés que le trader dans cette cause commune. Dans un bar, le voisin, quoi qu’il fasse, est aussi heureux que vous lors des victoires. » Slogan alternatif : 3 millions de rêves, un seul Lugano.
USA : Unis par une équipe, guidés par une passion « Ça ne m’emporte pas du tout. Le message est très basique et je ne pense même pas que le jeu de mots soit voulu. » Slogan alternatif : United Colors of laisse béton
Par Raphael Gaftarnik