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L’adieu au roi Carles Puyol

Par Thibaud Leplat, à Madrid
5 minutes
L’adieu au roi Carles Puyol

L’équipe la plus talentueuse de ces dix dernières années avait pour capitaine un homme qui ne s’embarrassait pas de bonnes manières. Carles Puyol a décidé d’arrêter parce qu’un roi part quand il veut. L’Espagne lui doit bien ça.

Celui qui a vécu comme un fou a bien le droit de perdre un peu son temps. De rêvasser à l’ombre des jeunes filles en fleurs. De se remémorer des souvenirs oubliés. À l’heure des honneurs, il rêverait des jours bénis où il était fort, où il était beau. Il aurait le droit de se dire qu’après autant d’années passées à courir après les autres, à chasser les rivaux qui le provoquent, à défendre les couleurs d’un maillot de plus en plus serré, c’était maintenant l’heure de s’asseoir, de regarder le passé dans les yeux et puis de s’alanguir un peu au milieu des courtisans. Carles Puyol aurait pu se faire désirer et faire grandir la rumeur. Il l’aurait nourrie de messages contradictoires. Il y aurait eu ceux qui auraient juré qu’ils savaient, mais qui n’auraient rien dit. Et puis il y aurait eu tous les autres. Ceux qui ne savent jamais rien, mais qui parlent toujours. Carles aurait pu nous faire mariner un peu. On l’aurait regretté un peu plus. On aurait fini par se dire que c’était de notre faute s’il partait. Mais Carles Puyol n’est pas de ceux-là. Il a des choses plus importantes à faire que d’agencer les mots de façon harmonieuse. Son langage à lui n’a besoin que d’une minute quarante-cinq (en catalan) pour tout dire : il quittera le Barça à la fin de la saison, il renonce aux deux ans qui lui restent, il ne sait par encore ce qu’il fera le 30 juin prochain, il organisera une conférence de presse à cette occasion, les questions y seront autorisées. Puyol, c’est clair, c’est net, c’est ça.

La ligue des patrons

Puyol, c’était le cœur, l’esprit, le visage, la jambe, le genou, les cheveux, le coude, la pommette, le sang, le corps de Barcelone. Une quarantaine de blessures, six opérations, un nombre infini de sauvetages, de visages ensanglantés, de tacles rageurs, de courses généreuses, d’envies de sauter encore plus haut, de rugir encore plus fort, de bramer encore plus dur. Les yeux fixes et l’air appliqué, Piqué, Messi, Abidal, Valdés, Alvés, Thiago n’étaient que des écoliers disciplinés à côté de celui qui n’était ni grand, ni beau, ni même doué. Mais il pouvait leur en gueuler, des choses. Jamais ils ne mouftaient. Personne ne répond à un roi. Même pas Messi. Surtout, il y avait Gerard et ses montées irresponsables : « Sur le terrain, je passe mon temps à parler et à donner de la voix. Une fois sur deux, c’est pour vérifier qu’il est bien attentif… Et il l’est. Je m’entends tellement bien avec lui sur le terrain que, parfois, on a même le temps de rigoler un peu. » Puyol n’avait rien de ces êtres misérables qui sont chefs comme ils seraient flics ou percepteurs. Puyol n’était pas le boss parce qu’il courait plus que les autres, ni non plus parce qu’il était entré au Barça comme ailier pour finalement se retrouver arrière central. Pourquoi au milieu d’une équipe de magiciens aux traits raffinés et aux manières policées, c’était un emmerdeur à perruque longue qui portait le brassard ? Les Culés le savent bien. C’est parce que tous ont rêvé au moins une fois de se faire engueuler par Carles Puyol.

Le siècle d’or

À Madrid aussi, Puyol est aimé. Au moins autant que Philippe IV, le roi d’Espagne à la tête de chou (le Henri IV espagnol). Peint par Velázquez, artiste de cour qui campait les nains et les fous comme des rois, le descendant des Habsbourg a les mêmes trais gras, les mêmes lèvres charnues, les yeux rapprochés, les mêmes cheveux blonds, le même air de victoire que Puyol. Tous les gamins espagnols qui défilent dans les longs couloirs des galeries consacrées au peintre andalou savent qu’au musée du Prado (le Louvre local), des salles entières sont ainsi tapissés de leur héros : Carles Puyol à la cour, Carles Puyol à la guerre, à la chasse, Carles Puyol sur son cheval, Carles Puyol et sa descendance. Au Prado, il n’y en a pas encore de Carles Puyol soulevant la Coupe du monde, mais il y en a de ses trophées de guerre. La ressemblance est troublante, un peu comme si chez nous Laurent Blanc avait des airs de Louis XVI. Puyol n’a pas que des allures de roi. Il en a aussi les manières et les valeurs. L’homme qui a marqué le deuxième but le plus important de l’histoire du foot péninsulaire (contre l’Allemagne en demi-finale du mondial 2010) est parti d’un coup sec. Parce que le corps du roi ne disparaît jamais et qu’il survit dans les mémoires de chacun de ses sujets. Puyol tapisse les murs de tous les musées imaginaires des Espagnols. Mais le roi a dit qu’il restait encore trois mois à jouer. Qu’il ne fallait pas s’apitoyer. Qu’il fallait jouer. Alors jouons.

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