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Javier Zanetti : Pour vous servir !
Manchester United a Ryan Giggs, la Roma, Francesco Totti, Chelsea, John Terry, le Barça, Carles Puyol, et l'Inter, Javier Zanetti. Le joueur-club à la fidélité la plus éprouvée, longtemps trompé par les promesses de son lunatique propriétaire, et enfin récompensé par le règne national des siens. Jusqu'à soulever une Ligue des Champions ?
Ce soir, Javier Zanetti aura faim. C’est que le stakhanoviste a été sevré. Samedi, pour la première fois depuis trois années et demi, le défenseur argentin n’a pas sué avec ses coéquipiers. Suspendu, « Il Capitano » a été privé du déplacement à Rome , terminus de 137 matches disputés de rang. A bientôt 37 piges, Javier Zanetti est un phénomène. Pas un joueur qui brille par sa technique ou par son élégance, mais un phénomène de régularité. Un style plutôt laborieux, mais une présence toujours productive et un charisme intact pour le recordman des sélections avec l’Argentine. A l’Inter depuis 1995, le “tracteur”, l’un de ses surnoms, ne s’est jamais fatigué de creuser son sillon, de labourer son flanc droit, malgré des récoltes miséreuses pendant plus d’une décennie : une Coupe de l’UEFA et en guise de guirlande, des Coupes d’Italie.
Sorte d’hydre à deux têtes, Zanetti est à la fois le symbole de l’Inter, mais aussi son antithèse. Constant, costaud, coéquipier modèle, “Il Capitano” se donne pour une équipe spécialiste des parcours en montagnes russes, capricieuse, et au mental de diva. Un peu cocu de l’affaire dans un environnement saturé de mercenaires. Une sentence qui s’applique de préférence à ses dix premières années de contrat, mais toujours d’actualité comme le montre la mauvaise passe traversée par le club en Serie A. A tel point que sa fidélité semble relever du sacrifice le plus total, comme une mère qui donne sa vie à un enfant atteint d’une maladie dégénérative.
Zanetti est aussi l’une des rares bonnes affaires faites par la dispendieuse cellule de recrutement interiste depuis quinze ans. A trois millions de dollars le transfert, son taux de rentabilité doit même dépasser les 100%. Et pulvériser celui de Recoba. Véritable roc à l’endurance de marathonien japonais, le “tracteur” ne passe quasiment jamais par la case garage. Toujours en parfait état de marche, il se tient à l’écart des sorties de route. Plus de dix ans que le capitaine ne s’est pas fait griller au feu rouge. Pas mal pour un défenseur souvent utilisé en milieu déf, le poste le plus exposé aux sanctions.
Capitaine imperturbable au milieu des nombreuses tempêtes qui ont secoué l’Inter depuis son arrivée en Italie -il a vu passer 13 coaches- Zanetti trouve-t-il une forme d’extase dans ce don gratuit ? En fait, en parfait stoïcien, l’Argentin semble suivre sa route vertueuse sans se laisser influencer par son environnement. Trouvant le bonheur dans l’ascèse professionnelle. Ce dernier a ainsi attendu plus de dix ans pour remporter un championnat, sans se laisser tenter par les sirènes du Real ou du Barça. Peut-être s’agit-il aussi d’amour aveugle, un peu comme Moratti avec la patte gauche de Recoba ? Surtout, Zanetti aime sa vie milanaise et ne l’échangerait pour rien au monde. Même pour une Ligue des Champions.
Reste qu’“Il Capitano” a gardé la foi, et sent son équipe mieux armée que jamais. « Jamais l’Inter n’a été aussi complet, la défense est impressionnante et en attaque, on est monstrueux avec Eto’o et Milito » avait-il déclaré avant le coup d’envoi de la saison. Avant d’ajouter : « Nous disposons d’un groupe mature, battant et capable de pallier n’importe quelle absence » . Ce soir, à San Siro, l’Inter sera justement privé de Lucio et Thiago Motta. Zanetti, pas à un sacrifice près, palliera sans doute le forfait du Brésilien au milieu. Mais où qu’il soit, une certitude : il fera le job. Comme toujours, et avec zèle.
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