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« J’espère qu’un jour, les Comores feront une Coupe d’Afrique »

Propos recueillis par Arnaud Clément
12 minutes
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Petit frère de Rohff, Ikbal, alias TLF, est un gros consommateur de sport, et notamment de football. Au point d'encore user des chaussures, d'enchaîner les nuits blanches de rediffusions ou d'aller donner la main aux éducateurs de son fiston aux entraînements. L'occasion était trop belle de parler avec lui de valeurs dans le foot, de son pote Karim Benzema ou de Serge Aurier, de ballon rond aux Comores ou du PSG, qu'il a aimé après avoir chéri l'ennemi marseillais...

Ikbal, tu as sorti fin février un clip intitulé « Grand frère » , en forme d’hommage à Rohff. Est-ce une forme de caviar que tu lui donnes après des tacles à répétition entre vous deux ?Non, il n’y a jamais eu de tacles, que des passes déc’, des p’tits caviars (rires) !

Dans ce clip, on vous représente tout gosses en train de jouer au basket. Tu es plus balle orange que ballon rond, donc ?Durant l’enfance, en bas des immeubles, il y avait du basket, mais aussi du foot. Plus de foot d’ailleurs, mais comme à Vitry, on avait un playground pas très loin de chez nous, on rentrait dedans aussi souvent. Je suis beaucoup la NBA aujourd’hui, jusqu’à 4 heures du matin. Ça me rappelle mon enfance, j’adorais suivre Mickael Jordan, Magic Johnson, Penny Hardaway… Et quand on jouait, c’était le plaisir qui primait, on a toujours été des sportifs chez nous. Et je suis aussi mordu de foot, je mate les rediffs quand je suis pris pour le direct, c’est presque maladif, c’est fou ce foot…


Comme tu le racontes dans la chanson, tu as suivi ses traces fidèlement. Dans une interview il y a quelques années, tu as déclaré : « Je sais ce que c’est que d’exister dans l’ombre de quelqu’un, je dois me donner 100 fois plus que certains rappeurs. » Tu es le Jordi Cruyff du rap français en fait ?
Ouais (rires). Récemment, on m’a dit que c’était un peu comme le film sur Apollo Creed. Ça a été à la fois un handicap et un avantage. On peut rencontrer des gens parfois grâce à ça, mais on peut aussi trouver des portes fermées pour tout un tas de raisons liées aux liens qui nous unissent. Les gens sortent : « Oh, ça va, on a déjà le grand frère… » Mais comme on lâche rien, s’ils oublient de fermer la fenêtre, et bien on passe par là (rires) !

Et tu te contenterais de vivre dans l’ombre de ton frangin, un peu comme le Troyen Johan Martial avec son frère Anthony ?Il n’y a pas qu’eux. Regarde les Pogba, les Cabaye avec un en CFA et l’autre en Angleterre… Je pense que chacun peut faire son petit bonhomme de chemin. Mais pour les parcours, c’est pas comparable entre le foot et la musique, où ça peut aller vite. Au foot, il te faut un agent, c’est un tout petit milieu, presque une mafia. Mais si tu as le bon titre en musique, tu peux vite basculer du bon côté. Je connais pas mal de petits artistes issus de la pop ou autre qui ont bossé chez eux, ont créé leurs sons avec leur guitare ou autre et jouent aujourd’hui devant des salles combles. Ça peut aller vite, il n’y a pas de règles. En foot, en revanche…

Aujourd’hui, comme les rappeurs, les footballeurs sont jeunes et ont le succès de plus en plus tôt. Certains n’arrivent pas à se détacher de là où ils viennent, de leurs potes qui ne sont pas dans le foot.

Parait-il que tu tapes encore pas mal du ballon pour le plaisir, et que tu enfiles même la casquette d’éducateur pour l’équipe U11 de ton fiston… Racontes-nous tout ça !L’année dernière, il jouait à Créteil et était surclassé. C’est un petit attaquant ou un milieu offensif. Là, il est revenu à Vigneux-sur-Seine, parce que les trajets à répétition étaient galères. Il a eu 10 ans et joue donc en U11. Des fois, on me demande des coups de main, comme ils ont vu que j’étais passionné et que je criais lors des interclubs (rires). Donc je vais donner la main aux coachs aux entraînements, puisqu’il manque d’éducateurs pour s’occuper de la soixantaine de gamins. Et ça m’éclate, j’aime motiver avec mon délire No Limit, surtout quand il fait froid, que c’est l’hiver et que tu les vois tous trembler. On va dire que je suis le papa passionné, mais je m’occupe de tous aussi bien, même si je suis un peu plus exigeant avec le mien… Mais bon, malgré ça, je le laisse tranquille, c’est un loisir jusqu’à 10-11 ans. Alors qu’il a un truc… Donc on va le motiver tout doucement. Il s’entraîne énormément : dès qu’il a fini l’école, il descend et va s’entraîner sur ses jongles, je lui montre quelques exercices contre le mur qu’il fait avec son petit frère ou moi-même. Mais on veut déjà le voir grandir avant de se projeter.

Est-ce cette fibre d’éducateur qui t’a lancé dans deux projets avec des jeunes autour du foot et du hip-hop, d’abord à Troyes, puis en Chine en mai ?Alors pour Troyes, un ancien joueur de foot a ouvert un centre sur place (Sébastien Dallet, ndlr), et un ami m’a proposé de reproduire une tournée promo qu’on avait faite dans les quartiers en jouant lors de matchs de Five, où on tâchait de faire comprendre le concept No Limit aux jeunes, avec ce que ça implique en matière de dépassement de soi, d’hygiène dans le vie, tant dans le sport que dans la vie… C’est une école de la vie le sport, c’est la base. Moi-même, tous les jours, j’essaye de travailler mon crossfit, mon cardio… Tous les jeunes Troyens seront les bienvenus cet été. Quant à la Chine, j’ai rencontré une amie quand je suis passé à Toulouse. Je l’avais vu dans une loge pour Téfécé-Nice, Steve Yago m’avait réservé une place. Et cette dame, qui travaille pour le commerce entre la Chine et la France – par exemple sur la privatisation de l’aéroport de Toulouse – nous a présentés des représentants chinois. Depuis, on ne se lâche plus. Elle m’a proposé d’aller voir les joueurs de Toulouse à l’automne quand ils commençaient à être pas bien. Et elle m’a proposé un show à Shenzhen, qui est une grosse cité économique. Ça sera un freestyle foot et concert, on le fait pour une bonne cause en plus, pour une maladie répandue en Chine chez les jeunes. Il y a Zizou qui est aussi derrière avec ELA. Je viens d’un certain pays, les Comores, et je sais d’où je viens. J’aurais aimé plus jeune que des gens viennent nous voir et nous proposent une ouverture sur le monde.

Tu me parlais d’école de la vie. Face aux scandales et à l’image sulfureuse qui collent parfois au foot, des parents ne préfèrent pas orienter leurs gosses vers le ballon rond. Pour le père que tu es, comprends-tu ces comportements ?Je comprends ces parents qui préfèrent d’autres sports que le foot pour leurs gosses, oui, sincèrement. C’est vrai qu’aujourd’hui, comme les rappeurs, les footballeurs sont jeunes et ont le succès de plus en plus tôt. Certains n’arrivent pas à se détacher de là où ils viennent, de leurs potes qui ne sont pas dans le foot. Je te parle en connaissance de cause, j’ai des amis qui sont de très grands joueurs et qui ont eu quelques frasques, au point où on parle d’eux tous les jours dans les médias, et ce que je leur disais, sans citer son nom…

Mais après, c’est aussi l’argent qui fait perdre pied à certains footeux. Le week-end, tu les retrouves en boîte, bouteille sur bouteille, les biatch qui traînent autour comme les mecs de la street prêts à gratter. Certains se font racketter sur Paris même…

… vu les indices donnés, ça laisse peu de place au doute…C’est vraiment mon ami, Karim, il connaît bien mes enfants par exemple. Et voilà, je trouvais ça dommage de rester sur une forme d’immaturité, sur ce concept de fidélité à tout prix. Chacun fait sa route dans la vie et il faut avancer. Les potes d’enfance avec qui j’ai fait des conneries, ça m’arrive de les voir de temps en temps, mais je dois faire ma vie, gérer ma famille, investir et travailler… Là, quand on voit ces frasques, pour tous les jeunes ou les amateurs qui ont les yeux rivés sur eux, c’est pas le bon exemple. Lorsque je mate du volley-ball, avec les Bleus, du handball, le biathlon avec les succès de Martin Fourcade, le ski, je trouve une bonne atmosphère, du partage, de la solidarité. En sport, il n’y a plus de caillera qui tienne. Et pour moi, le foot perd un peu ces valeurs-là. Aurier, il aurait pas eu son pote à côté… Je le soutiens, c’est une erreur qui est humaine. Mais cette connerie, ça va le suivre à vie. Il prendra ses millions quand même, mais l’exemple pour les petits derrière avec ce Périscope et ce qu’il a balancé à son entraîneur qui s’est battu pour lui… « Ouais je viens de Sevran ! » Je trouve ça dommage. Mais après, c’est aussi l’argent qui fait perdre pied. Le week-end, tu les retrouves en boîte, bouteille sur bouteille, les « biatch » qui traînent autour comme les mecs de la « street » prêts à gratter. Certains se font racketter sur Paris même… Alors un conseil à ces jeunes footeux : restez à votre place, arrêtez de faire les voyous, profitez de votre talent.

Et alors, est-ce que les jeunes des Comores sont préservés de tout ça dans leur rapport au foot et que représente ce sport là-bas ?Dans mes souvenirs, tous les jeunes ou presque jouaient au foot durant notre enfance sur l’île. À 7 ou 8 ans, on était pieds nus, les cheveux crépus plein de sable, avec un ballon en journal qu’on scotchait, comme tu peux le voir dans d’autres pays africains. Une bouteille, du journal, une petite balle en éponge, on s’accommode de tout. Et jouer et courir après un ballon, ça nous habitait. C’était magique de voir tout le monde que ça peut rassembler… Des Comores jusqu’au fin fond de l’Amazonie, mon frère !

Cette sélection comorienne est toute jeune, avec ses dix ans d’existence. Et pourtant, elle a fait trembler le Ghana il y a peu, en éliminatoires de la Coupe du monde 2018, en les accrochant à l’aller avant de s’incliner à Accra. Tu as suivi ça de près ?On a bien tenu contre le Ghana, on a prouvé qu’on pouvait rivaliser. J’ai vibré, bien sûr ! Après, comme tu l’as dit, on est tout jeunes à ce niveau, mais on sort la tête haute. Et avec le temps, j’espère qu’un jour, les Comores feront une CAN, histoire de leur montrer à tous ces Africains (rires). Peut-être d’ici cinq ou six ans. On est derrière eux en tout cas, qu’on perde ou qu’on gagne. C’est compliqué de les voir à la télévision, mais on les supporte à la vie à la mort.

Une bonne part de la sélection actuelle est née en France, à l’image de Chaker Alhadur, Djamel Bakar, Kassim Abdallah ou Ali Ahamada. Se pose-t-on les mêmes questions d’identité qu’ici avec ces jeunes qui ne sont pas issus de la terre natale, là-bas ?Alors déjà, si je peux me permettre, big-up à Ali Ahamada, c’est mon poto ! Ensuite, pour te répondre, je ne pense pas. C’est une équipe qui rassemble, comme les rappeurs comoriens de France un peu. On n’est pas là-bas, mais tous les jeunes sur place connaissent. Le lien France-Comores est fort. Que ce soit pour Rohff, Soprano, Alonzo ou d’autres, ça représente un rêve pour eux donc tout le monde est derrière, et c’est pareil pour le foot. Et ensuite, le plus logiquement du monde, le sélectionneur doit prendre les meilleurs, qu’ils soient nés ici ou là-bas…

Faut arriver petit à petit à ce que le PSG battent ces gros que sont le Real et le Bayern. On n’est pas loin, mais il manque le petit plus. En revanche, le Barça, jamais… Peut-être dans trois ans, et encore.

D’ailleurs, un Comorien qui n’est pas pour l’OM, mais pour le PSG, est-ce qu’on appelle ça une exception à la règle vu la communauté basée à Marseille ?À Marseille, oui, mais je ne le suis pas. Enfin, j’ai été supporter de l’OM il y a longtemps, au temps de Tapie. On était tous Marseillais de toute façon à l’époque, avec la Ligue des champions, le beau jeu, Papin, Waddle… En Coupe d’Europe, tout le monde est derrière eux. Donc là, j’espère que tout le monde y compris les Marseillais seront derrière le PSG pour les quarts de finale, ils en ont besoin nos Parisiens. C’est comme Sangoku dans Dragon Ball Z, il est là à gueuler : « Envoyez moi votre force ! » Et si Hercule n’avait pas été là… Et ben là, pareil, envoyez-nous votre force les Marseillais !

Mais qu’est-ce qui peut faire passer quelqu’un du statut de supporter de l’OM à celui du PSG ?Franchement ? Ronaldinho ! Quel bonheur… Dès que j’ai vu que le club pouvait prendre des mecs comme ça, je me suis dit que là, ça tapait fort. Ensuite, j’avais relâché la pression quand ça jouait pas. Et depuis l’ère qatari, je m’éclate. Ça y est, on a un style de jeu bien défini, c’est la possession, la maîtrise, et j’adore. Je pense qu’on pourrait encore avoir meilleur qu’Ibra devant quand même… Et Cavani aussi, faut qu’il dégage. On doit les remplacer.

Et tu le remplacerais par qui ?J’ai le choix ?

Vas-y, chéquier No Limit avec Nasser…
OK, alors un Neymar ou un Suárez ! Le petit Reus aussi. Ou la pépite de la Juve, Dybala. Luis Suárez, s’il dit oui, Ibra peut aller où il veut… Après, il faudrait aussi un autre milieu. Rabiot, même s’il est bon en ce moment, j’adhère pas à son jeu… Quand tu vois Verratti… S’il est absent, ça se voit plus que si Rabiot n’est pas là. Soudainement, Motta et Matuidi brillent avec Marco. Il manque des pépites comme lui. Les grandes équipes en ont, pourquoi pas plus chez nous ? Et Ibra sera pas éternel.

Tu as vu le tirage au sort des quarts de la C1 et le sort réservé au PSG avec Manchester City… Satisfait ?On a eu le troisième choix, on a de la chance avec les Anglais ces temps-ci… On peut les prendre, oui. Mais plus on va se rapprocher de la fin, plus ça sera chaud. Et alors le dernier carré qui se prépare…

Si en demi, ils se qualifient et retrouvent le Barça, ton cœur va balancer… Le PSG peut-il enfin y arriver ?Franchement ? Même pas en rêve (rires). On est dans les quatre meilleurs d’Europe, mais on est la quatrième. Faut arriver petit à petit à battre ces gros que sont le Real et le Bayern. On n’est pas loin, mais il manque le petit plus. En revanche le Barça, jamais… Peut-être dans trois ans, et encore.

L’album « No Limit » de TLF sort ce vendredi 1er avril.

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Propos recueillis par Arnaud Clément

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