- France – Ligue 1 – Stade rennais
Et bah alors, il commence quand Juan Quintero ?
Il était le bonbon de la fin du mercato estival du Stade rennais : Juan Quintero, petit phénomène colombien, étiqueté joueur plaisir, manieur fou prêté par le FC Porto pour s'endurcir dans la rugueuse Ligue 1. Sauf que plus d'un mois après son arrivée en Bretagne, la Pulga de Medellin n'a toujours pas une apparition sur la feuille de match…
C’était le 19 juin 2014 à Brasilia, face à la Côte d’Ivoire. Du puits sans fond qu’est le réservoir du football colombien émergeait un nouveau petit bonhomme nommé Juan Quintero. Entré en jeu quelques minutes auparavant en remplaçant Ibarbo, le gamin était parfaitement lancé par Teo Gutiérrez à la limite du hors-jeu et s’en allait tranquillement tromper Barry Copa d’un plat du pied sécurité plein de maîtrise, pour le 2-0 qui allait finir en 2-1 à la fin du match. Quintero, ce blaze qui sonne bien, les suiveurs du championnat portugais l’avaient déjà en tête depuis qu’il était arrivé à Porto l’été précédent, en provenance d’Italie et du club de Pescara, où il avait fait connaissance avec le football européen. En déroulant plus en amont encore la carrière du garçon, il y a les débuts à la maison avec Envigado (où ont également commencé Fredy Guarín et surtout James Rodríguez), puis le prestigieux Atlético Nacional. La carrière est alors linéaire, l’ascension quasi parfaite, l’intérêt des plus grands clubs permanent, car le talent évident, tendance dynamiteur provocateur.
Comme Lucas, Luís Fabiano ou Silvio Romero ?
Pourtant, au sortir de ce Mondial 2014 en forme de révélation, Quintero joue encore moins à Porto que lors de sa première saison, devant se contenter d’un rôle de joker. Il lui est notamment reproché d’avoir l’endurance d’un asthmatique et la volonté d’un procrastinateur lorsqu’il s’agit de s’acquitter du travail défensif. Depuis le début de l’année 2015, l’international colombien n’a disputé que 501 minutes de jeu en compétition, dont les dernières, 67 très exactement, lors de la victoire 2-0 de Porto face à Penafield en clôture de la précédente saison du championnat portugais. Et encore, il n’avait pas joué les journées précédentes. Non retenu pour disputer la Copa América cet été, Quintero a aussi vu sa présaison retardée par une blessure puis perturbée par une autre. Ce constat posé, il n’est pas scandaleux de ne toujours pas l’avoir vu sur une pelouse de L1 avec le maillot du Stade rennais où il a été prêté à la surprise générale fin août. Pour postuler la succession de Lucas, Luís Fabiano ou plus récemment Silvio Romero dans la catégorie « flop sudam’ du Stade rennais » , il va falloir attendre un peu quand même… Après tout, le garçon est logiquement là jusque la fin de saison et il reste encore 29 journées de championnat à disputer d’ici là.
Pas de passe-droit avec Montanier
« Il est un peu en décalage par rapport à nous, expliquait Philippe Montanier après le passage au contrôle technique du joueur quelques jours seulement après son arrivée. On prendra le temps qu’il faudra pour qu’il soit bien physiquement. » Le coach des Bretons n’est pas un menteur : le temps est effectivement pris pour contribuer au bon rétablissement physique de la recrue ! La « pulga de Medellin » , comme le surnomme Ntep sur Twitter, a naturellement un physique râblé et les cuisses potelées d’un nourrisson, mais le coach rennais et son staff n’auraient que modérément apprécié d’avoir récupéré un joueur au talent indéniable, mais aux kilos en trop tout aussi incontestables et évitables. Certains faisaient état de cinq bons kilos à gommer, d’autres carrément de sept à huit. Dans les deux cas de figure, c’est beaucoup, et Montanier n’est pas du genre à plaisanter avec la condition physique de ses ouailles. Alors tout Quintero qu’il est, toute nouvelle star du football sud-américain à plus d’un million de followers qu’il représente, il n’a pas de passe-droit et doit donc patienter. Quitte à ruminer un peu, mécontent de ne pas avoir pu figurer sur les dernières feuilles de match. C’est compréhensible, et en même temps, c’est tout aussi compréhensible de voir l’ancien entraîneur de la Real Sociedad rester fidèle à son système tactique qui marche plutôt très correctement depuis le début de saison, avec un Doucouré au profil complètement différent en poste de meneur, qui a réalisé une belle prestation ce dimanche à Monaco. Doucouré, c’est évidemment beaucoup moins sexy que Quintero, mais ça rapporte des points à un Stade rennais au pied du podium de la L1, alors pourquoi en changer ?
Doublé par Boga contre… Pontivy
C’est d’ailleurs peut-être tout le problème du « cas » Quintero jusqu’à présent : il est un nom connu sur la scène internationale, une promesse de gestes spectaculaires, mais cette image se heurte à une réalité tout autre. Mis pour la première fois à la disposition de la réserve ce week-end face à Pontivy en CFA2, il a plutôt bien géré ce premier match de reprise le concernant, mais c’est une autre recrue plus énigmatique encore, arrivée le même jour à la fin du mercato, qui a flambé : Jérémie Boga, issu de la pépinière de Chelsea, seul buteur du match. Le très jeune espoir français paraît plus proche de l’équipe première que Quintero. D’ailleurs, il a déjà gratté trois bouts de match depuis le début de saison. Alors en attendant peut-être un jour Gourcuff, la concurrence commence en fait déjà à se bousculer pour le Colombien, puisque l’enfant terrible de la formation rennaise, le très prometteur Ousmane Dembélé, a enfin signé un contrat pro en Ille-et-Vilaine après avoir failli partir cet été. Or, il se trouve qu’une belle place devrait se libérer pendant quelques matchs dans le onze de départ de Philippe Montanier en raison du claquage de Paul-Georges Ntep qui devrait l’éloigner des terrains pendant six à huit semaines. À qui cette absence sur l’aile gauche va-t-elle profiter ? Certainement plus meneur qu’ailier, Juan Quintero va-t-il enfin apparaître au moins dans le groupe qui recevra Nice lors du prochain match de Rennes après la trêve internationale – une équipe avec des gabarits similaires au sien du milieu de terrain ? Mystère. Après avoir pas mal communiqué sur l’arrivée du Colombien les premiers jours – avec notamment une vidéo teasing très prometteuse issue d’une séance d’entraînement –, le club a décidé de ne plus s’enflammer et de se montrer bien plus discret sur ce cas sensible.
Par Régis Delanoë