- Angleterre – Community Shield – Arsenal/Chelsea
Community Shield : un match de gala, seulement ?
Version britannique de notre Trophée des champions, le Community Shield est, de l'aveu des managers le disputant eux-mêmes, plus un match de gala qu'une confrontation sérieuse. Pourtant, depuis les années 1970, cette rencontre gagne en sympathie. Celui de cette année s'annonce même intéressant.
« Ce n’est pas un match amical… c’est un peu plus que cela, mais moins important qu’un match de championnat. » Voilà en quels termes José Mourinho parlait, ce vendredi en conférence de presse, du Community Shield que son équipe disputera aujourd’hui face à celle d’Arsène Wenger. Et c’est peu dire que le technicien français est sur la même longueur d’onde : « C’est un match important, mais nous sommes encore en préparation. » Voilà ce qu’est le Community Shield. C’est un peu tout à la fois : un match de préparation, un match amical, un match de gala toutefois jamais totalement dénué d’intérêt. Celui de ce jour est, et ce, parce qu’il réunit deux des meilleurs ennemis du football anglais contemporain pour une énième confrontation, un match que tout le monde attend un peu plus qu’à l’accoutumée. Et au regard de ce qu’était ce match il y a encore quelques années, et du non-respect avec lequel les clubs le traitaient, c’est déjà une nette amélioration. Aujourd’hui, les équipes prennent au moins la peine de le jouer…
La foire des années 1970
Il y a plus de quarante ans, alors que la Grande-Bretagne avait le privilège de faire naître le rock progressif et les groupes de génie lui donnant vie, le Community Shield était encore appelé le Charity Shield. Et son déroulement était alors à peu près aussi fou qu’un morceau de Syd Barrett sous LSD. Lors de la saison 1970-1971, par exemple, les Gunners avaient remporté le doublé coupe-championnat, posant un gros problème aux organisateurs du Charity Shield. Un problème qui prit une proportion toute nouvelle quand Arsenal décida de ne pas participer à la rencontre, préférant privilégier un tournoi de matchs amicaux organisé de longue date. Dans la confusion, c’est donc Leicester City, champion de Division Two, et Liverpool, finaliste de la Coupe, qui avaient disputé le Charity Shield. Les promus l’avaient emporté sur la plus petite des marges (1-0) à Filbert Street, remportant ainsi un trophée boudé par les champions en titre.
Un an plus tard, en 1972, rebelote. Derby County, qui avait remporté le championnat, devait affronter Leeds United, vainqueur de la Coupe en ouverture de la saison 1972-1973. Mais, sans doute bien inspirés par le refus des Gunners l’année précédente, les Rams et les Peacocks avaient tous les deux refusé de disputer le Charity Shield. Face à cette situation inédite, les organisateurs avaient eu quelques semaines pour bricoler un semblant d’affiche. En 1972, c’était donc Manchester City, quatrième du championnat la saison précédente, et Aston Villa, champion de Third Division, qui avaient accepté de disputer le Charity Shield. La courte victoire de Manchester City (1-0) permit même aux Citizens de disputer à nouveau le trophée en 1973, alors même que le club avait terminé à la onzième place du championnat ! En 1974, Ted Croker, à la tête de la FA, tenta d’insuffler un brin de logique et de régularité dans cette compétition en faisant jouer les matchs à Wembley, par exemple.
Wenger vs Mourinho
Aujourd’hui, le Community Shield a gagné en stabilité et en saveur. Depuis 1993, une séance de tirs au but vient départager les deux équipes en cas d’égalité après 90 minutes de jeu. Et c’est peut-être mieux ainsi. Car dans les années 1980, un match nul voulait dire un trophée partagé… Six mois dans un club, puis six mois dans l’autre. La disparition de cette garde alternée permet au moins aux clubs d’aborder cette rencontre avec une envie : celle de garnir l’armoire à trophées d’un titre, aussi mineur soit-il. Et ils ont beau affirmer le contraire, José Mourinho et Arsène Wenger ont tous deux envie de remporter ce Community Shield. En treize confrontations directes, Arsène Wenger n’a jamais réussi à vaincre José Mourinho. Pas une seule fois. Et sans détour, comme à son habitude, le Portugais n’a pas manqué de le lui rappeler en conférence de presse. Une guerre des mots qui laisse présager un combat plus engagé que prévu sur le terrain.
« À sa place, je me demanderais pourquoi. Je voudrais trouver des réponses, pas pour me sortir d’un blocage mental quelconque, mais pour aider mon équipe à le faire. J’essaierais de trouver des raisons pour comprendre pourquoi tout va toujours contre mon équipe » , a expliqué José Mourinho en évoquant le bilan d’Arsène Wenger contre Chelsea, s’empressant bien sûr d’ajouter que de son côté, sa pire série contre un même manager était de deux défaites contre Tony Pulis. Ce combat de mots d’avant-match n’est bien évidemment pas nouveau. Les deux hommes s’adonnent à de pareilles joutes verbales avant chacune de leurs confrontations. Signe que ce Community Shield, que tout le monde annonce comme un match amical de luxe, sera en fait bien plus. Et comme souvent lors d’un Chelsea-Arsenal, la pression est sur les épaules d’Arsène Wenger.
Par Gabriel Cnudde