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Clément d’Antibes : « Mon coq a une accréditation »
Né un 29 février en Algérie, de père polonais et de mère espagnole, Clément Tomaszewski, connu sous le nom Clément d'Antibes, est devenu en quelques années le supporter le plus connu de l'équipe de France, avant même Francis Lalanne. Ce soir, à Lens, il vivra son 150e match en Bleu, avec Balthazar, son coq...
Comment est né Clément d’Antibes ?
Mon premier match, c’était en 1982, en Espagne à Bilbao, un match perdu contre l’Angleterre. J’allais à droite, à gauche. Jusqu’en 1998, j’étais comme tous les supporters français, un anonyme. J’étais en maillot avec rien dessus. Clément d’Antibes est apparu le 8 juillet 1998, pour un certain France-Croatie. J’avais fait floqué mon nom « Clément Tomaszewski, hospitalier d’Antibes » , mais ça s’est décollé. Le lendemain de la demi-finale, au Décathlon du Stade de France, je l’ai fait floqué définitivement Clément d’Antibes.
Ce soir, vous êtes à Lens pour le match contre le Costa Rica…
Ce soir, ce sera mon 150e match, le dernier, France-Espagne, c’était le 149e. Demain, je repars sur Antibes, après-demain, je vais en Tunisie, je repars le 31 mai sur Antibes. Le 1er juin, je vais à la Réuinion, je reste jusqu’au 8. Après je vais jusqu’à Madagascar puis Johannesburg et Le Cap
Vous êtes d’Antibes au moins ?
J’ai débarqué à Antibes après l’armée en septembre 1969, j’habitais alors Bergerac en Dordogne. Mon père était légionnaire, ma mère était espagnole et moi je suis né en Algérie. Le bon supporter français quoi : mieux, y’a pas. Du sang polonais, espagnol et né en Algérie. Je suis toujours à Antibes, j’ai fini de payer mon appartement il y a deux ans. J’ai travaillé pendant 36 ans à Antibes comme infirmier. A chaque fois, je prenais tous mes congés annuels, mes congés maladies parfois en fonction des déplacements de l’Equipe de France. Je calquais tout en début d’année. Ca m’a permis d’aller dans tous les pays d’Europe jusqu’en Corée du Sud, en 2002, pour pouvoir supporter les Bleus et surtout pouvoir visiter tous ces pays. Quand je suis rentré à l’hôpital, j’étais infirmier, plâtrier, gypso-technicien, quand vous vous cassez le poignet, le bras…ou n’importe quoi.
Et le coq, c’est toujours le même depuis toutes ces années ?
C’est toujours Balthazar. Il a 67 matchs, si on multiplie par 25, c’est mille ans ! Il vient de mon poulailler, j’ai une petite campagne, il y a des poules, des lapins… Balthazar vit avec ses cinq poules, alors que moi j’en ai que deux! Il me suit, il a son maïs avec lui. Il est sur mon sac, il est bien nourri. Malgré tous les problèmes que j’ai eu avec la SPA en 2000, en Allemagne, au Portugal, en Belgique aussi… Ils m’accusaient de maltraitance sur l’animal, que c’était un « scandale » , ils pensaient que je l’amenais là juste pour le lancer sur la pelouse. C’est faux, j’ai son accréditation, l’autorisation officielle de Claude Simonet, renouvelée par Jean-Pierre Escalettes, pour l’amener exceptionnellement sur tous les stades de France et de Navarre.
C’est pas contraignant dans les déplacements ?
Dans les hôtels, il y a eu des problèmes à 5h du matin. Notamment à Valencia où il s’est mis à chanter. La police espagnole est arrivée, et il a fallu quitter l’hôtel manu militari, on s’est fait jeter comme des malpropres. Le coq avait chanté, il a réveillé tout l’hôtel. On en a pris un autre. S’il chante le matin, on gagne souvent.
L’Affaire Zahia a-t-elle écorné l’image que vous avez des Bleus ?
Ils ont 25, 27 ans, ils sont dans la fleur de l’âge, ils en profitent, c’est normal. Moi quand je vais en déplacement, je fais toute l’Europe, ça m’arrive de m’amuser aussi. C’est pas cher en plus ! Ce sont des joueurs, des êtres humains, ils en profitent. Après, aller vendre ça en pleine rue, sur la place publique, ça fait mal. Mais ça n’enlève en rien la qualité du joueur. Moi je me dis que ce sont des bons vivants, ils en profitent même s’ils ne sont pas beaux, ils en profitent avec le pognon qu’ils ont. Sur le terrain, ce que je regarde, c’est d’abord la qualité intrinsèque du joueur, qu’il mouille le maillot. Qu’il ne mouille pas seulement la culotte de la gonzesse, mais qu’il mouille le maillot. Ils sont respectueux envers moi quand j’assiste à l’entraînement. Ce côté culotte rose me fait sourire plus qu’autre chose. Surtout quand je vois que Rama Yade s’en mêle, alors que dans les milieux politiques, c’est pire.
Vous partagez le désamour du public pour les Bleus ?
Absolument pas. Je suis tout d’abord supporter de l’équipe de France, puis supporter de l’OGC Nice. J’ai été écœuré par le comportement des supporters et de la presse vis-à-vis de Domenech. Autour de moi, les gens me disaient même « tu fais une connerie d’aller en Afrique du Sud, tu vas faire l’aller retour » . On me dit même aujourd’hui ironiquement : « vous serez champion du monde, parce que la France joue à domicile » … Cette histoire d’équipe de blacks, c’est quotidien. Je n’ai aucun problème avec Domenech ou la sélection, je suis toujours là, je respecte j’ai confiance, je suis fidèle. Je suis là pour les encourager dans la victoire, comme dans la défaite.
Alors, c’est une bonne chose ce 4-3-3 ?
Je le dis, c’est « Respect » et « Confiance » . Il fait son choix, il utilise les joueurs qui lui semblent les meilleurs. A mon avis, il n’est pas si con que ça. Il est entouré de mecs come Boghossain, Martini et il va pas mettre des mecs aux pieds carrés. Pour la tactique, c’est lui qui s’adapte. Ce soir, c’est match test. C’est le départ du marathon. Il y a de la qualité dans cet effectif. Il y a un bon groupe, il faut en faire un collectif, il faut qu’elle ait une âme, et elle ne l’a pas eu pendant les qualifs. Quelle que soit la tactique employée, il doit faire avec ce qu’il a. Je lui fais entièrement confiance.
Avez-vous réussi à chiffrer les coûts de tous ces déplacements ?
Ce sont des années de salaires. J’ai dû faire, tous déplacements confondus, 300 000 kilomètres. Ca chiffre quand même. Je travaillais, les déplacements correspondaient à mes congés annuels. Là où les gens vont à Djerba ou à Venise, moi je me déplaçais avec l’équipe de France, tout bêtement. J’avais ma paye. Des fois, ma fille ou mon fils m’aidaient financièrement parce qu’ils voyaient que j’étais à la rue. Et puis je faisais des petits boulots à droite à gauche pour me déplacer. Mais des fois quand je me déplace, c’est sandwich, sandwich et resandwich. Je dors n’importe où. C’est le camping, dans la voiture ou dans une église. Je pars un peu à la bohème.
Pas trop peur de voyager en Afrique du Sud ?
Bien sûr, en plus j’y serai avec mon fils. Mais dans tous mes périples, dans mon marathon bleu, je ferai à 32 heures d’avion, et en ce moment les avions, ils ont plutôt tendance à ne pas atterrir, malheureusement… J’en suis conscient, je regarde les émissions consacrées à l’Afrique du Sud. Il y a environ 40 assassinats par jour, c’est le pays avec le plus de mortalité, d’assassinats…On sera un peu plus vigilants. Mais le danger, il y en a partout, aussi bien en Hollande, en Corée…On en profitera pour visiter. En Afrique du Sud, on n’y va pas tous les 6 mois. L’Afrique du Sud, c’est Mandela, les Bauers, le Cap de bonne Espérance, les Zoulous, les grands parcs, c’est un privilège d’y être.
Quand Balthazar ne sera plus là, vous continuerez quand même ?
Parfois, je ne peux plus le prendre avec moi dans l’avion, je me sens un peu déshabillé. Le maillot et le coq sont indissociables. Evidemment, il y a quelque chose qui me manque quand il n’est pas là. Il fait partie de l’entourage. Quand je ne peux pas le prendre, ça m’emmerde un peu, c’est totalement différent.
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