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Belouet : « Dès que je peux, je retourne en Inde »

Propos recueillis par Régis Delanoë
Belouet : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Dès que je peux, je retourne en Inde<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Jusqu'en 2011, Maxime Belouet menait une monotone carrière de joueur semi-pro en France. Depuis, il a disputé le championnat de Singapour avec une franchise française, failli signer dans un club thaï du nom de Police United, joué les pionniers en Inde, été compagnon de galère de Pascal Chimbonda à Brunei

Comment a débuté ton aventure en Asie ?Je suis parti à Singapour en 2011 rejoindre une équipe française qui évoluait là-bas à l’époque, l’Étoile FC. Avant ça, je jouais en National à Orléans, ma ville de naissance, mais ça ne se passait pas très bien avec l’entraîneur Yann Lachuer. Jean-Marc Nobilo, que je connaissais de l’époque où il était au Havre, avait parlé de moi à M. Troussier et à son adjoint, un Suisse qui s’appelle Guglielmo Arena et qui venait de prendre les rênes de l’Étoile FC. Il m’a fait venir trois semaines en test à Singapour et j’ai été pris.

C’était comment, Singapour ?C’était top. J’ai quand même joué un match de charité pour les victimes du tsunami japonais avec une sélection des meilleurs joueurs de la ligue contre d’anciens internationaux, dont Nakata. Un chouette souvenir.

Quand même, t’as pas hésité un peu avant de partir là-bas ?Si, un peu mais j’ai pris quelques renseignements et je savais que ça pouvait me faire une bonne entrée vers le marché asiatique. Et puis, au pire, si je me plaisais pas, je pouvais toujours revenir hein… Faut savoir que l’Étoile FC fonctionnait comme une franchise française, c’était chouette à vivre, on a même fait l’objet d’un reportage du Canal Football Club. Bon, ça existe plus aujourd’hui mais franchement, c’était sympa. Et puis Singapour, c’est magnifique, le niveau de vie est mieux encore qu’en Europe, c’est pas le tiers-monde là-bas, c’est la jet-set.

Donc après ça, tu es resté en Asie ?Oui, j’étais proche de signer avec Police United, un des meilleurs clubs de Thaïlande et puis finalement, ça a capoté. C’est après que j’ai eu une proposition du champion d’Inde en titre, Salgaocar. J’y ai signé deux ans et j’ai pu jouer la Ligue des champions asiatique, aller en Jordanie, à Oman, en Ouzbékistan… En plus, l’entraîneur était marocain et parlait français, c’était pratique.

Pourquoi ne pas y être resté alors ? En fin de saison, j’ai eu une entorse. Et là-bas, une entorse, c’est comme si t’avais le pied coupé, pareil. On m’a seulement mis de la glace. J’ai essayé de jouer sous injection mais ça devenait galère et je me suis pris la tête avec le manager. C’est là que j’ai appris que sur mon contrat, le club avait mis une clause stipulant qu’en cas de blessure, il pouvait y avoir rupture, un truc totalement interdit par la Fifa, mais eux, ils s’en foutent royal. Alors j’ai fini par rentrer et là actuellement, je fais un dossier avec mon avocate pour clarifier ma situation auprès de la Fifa. En vérité, je ne sais même pas si je suis toujours sous contrat ou pas actuellement. Normalement, je le suis jusque mai 2013 avec le club indien mais je ne suis plus payé alors…

Donc là, t’es en France ?Non, je suis en Suisse, logé chez mon entraîneur de l’Étoile, M. Arena, avec qui j’ai sympathisé. Il m’aide beaucoup, grâce à lui, je continue de m’entraîner avec une D4 locale, à Montreux. Avant ça, je suis retourné à Orléans, où j’ai aussi pu m’entraîner avec l’équipe. Et récemment, je suis aussi parti au sultanat de Brunei, mais ça s’est pas bien passé.

Raconte…On m’a fait venir là-bas, billet d’avion payé, j’étais avec mon ami Pascal, Pascal Cjimbonda, et aussi un autre gars connu… Luis Boa Morte, c’est ça. On arrive, dès le premier entraînement, on dispute un match contre une autre équipe locale, le lendemain pareil, match direct, le surlendemain aussi. Et là, boum : t’as cinq nouveaux joueurs étrangers qui déboulent de je ne sais où ! Avec Pascal, on a commencé à se demander où on était fourrés… Puis cinq jours après, cinq nouveaux joueurs sont encore arrivés, et ainsi de suite. Et là, on a compris. En fait, on était dans le club du fils du sultan et c’est lui qui décidait de tout. Il venait tous les jours nous voir, dès qu’il arrivait, le match débutait, dès qu’il repartait, on arrêtait. C’est-à-dire que s’il débarquait seulement à 5h30 et qu’il partait pour sa prière de 6h, on poireautait en l’attendant, on jouait une demi-heure et basta. C’est lui qui payait les billets d’avion, il faisait venir des joueurs à l’infini comme ça lui plaisait. À la fin, on était tellement nombreux, on aurait pu faire plusieurs équipes. Bref, au bout de quinze jours, on m’a dit merci et je suis parti, on m’a dit qu’on allait me rappeler mais j’ai plus eu aucune nouvelle. Je crois qu’un Français a fini par signer un contrat, mais c’est pas Pascal. Il s’agit de Stéphane Auvray. Pascal, il est parti aux États-Unis je crois. Ça me tenterait bien mais pour partir en essai en MLS, tout est à ta charge, l’avion, l’hôtel… Financièrement, j’ai pas 3000 euros à investir là-dedans.

Tu chercherais pas à te poser en Europe après toutes ces aventures ?Surtout pas ! J’ai eu quelques touches en France récemment, avec des clubs de CFA, c’était correctement payé en plus, mais j’ai vraiment pas envie de retrouver le « circuit » français. Et ailleurs en Europe, j’ai aussi des contacts, genre au Portugal, Chypre, Grèce… Mais c’est la galère là-bas, t’es pas sûr d’être payé. Alors qu’en Asie au moins, c’est pas la crise. Tu perçois ton salaire en temps et en heure, et plutôt correctement. Dès que je peux, je repars en Inde. Leur mercato se termine mi-février, normalement j’attends cette semaine une proposition de contrat d’un club de D2 qui joue la montée l’année prochaine, ça a l’air intéressant.

Qu’est-ce qui te plaît tant en Inde ?C’est un pays où les gens sont adorables et passionnés. Vraiment, insiste là-dessus, ils sont extras. Ils sont pauvres et pourtant, ils sont prêts à te donner tout ce qu’ils ont. On jouait régulièrement devant 40 000 personnes, certains derbys se disputent devant 130 000 personnes ! C’est incroyable à vivre. À part l’histoire avec cette entorse, c’était vraiment le top pour moi. J’avais un salaire payé cash, l’avion gratuit pour moi et ma femme, un appart… Et le coût de la vie est dérisoire. Entre ça et le National ou même la L2, t’as de quoi hésiter… J’ai vécu des trucs que j’aurais jamais pu vivre en restant en France.

Et niveau foot, ça donne quoi ?Il y a moins de rythme qu’en France, ça c’est clair, mais il faut dire qu’il fait très chaud aussi. Physiquement pareil, c’est moins bon. Tout ce qui est indien, thaïlandais, c’est petit et vif (sic). Donc pour compenser, ils prennent surtout des Nigérians, bien costauds. Moi, c’est un football qui me convient, très technique. Je vais pas te raconter des salades et te dire que ça vaut la L1 en France mais il y a moyen de bien s’y éclater.

Tu sais que tu es le premier Français à y avoir évolué ?Oui, j’étais même quasi le seul Européen je crois. Ah non, il y a aussi un Anglais qui a joué en Premier League dont j’ai oublié le nom qui y a joué. Bon, il est resté que trois mois… Faut croire que c’était pas fait pour lui.

Le foot asiatique, c’est le futur ?Dans quelques années, ouais. C’est là où il y a l’argent, donc forcément… Et s’ils n’ont pas la culture foot comme en Europe, ils apprennent vite, c’est des bosseurs. Tu leur demandes de taper deux heures avec un ballon contre un mur, ils vont le faire. La Thaïlande aussi, c’est pas mal, il y a plus d’Européens. Le frère de mon pote Jérémy Berthod y était dernièrement… Après, la mentalité là-bas, c’est spécial quand même : t’es bon, t’es la star, t’es moins bon, ils vont tout faire pour te virer. Les règles Fifa, ils s’en foutent complètement. Mentalement, faut être costaud. Et puis bon, t’entends parler qu’il y a la mafia, on va pas se mentir.

Le récent scandale de matchs truqués parle d’ailleurs de cette région, notamment de Singapour…Ouais, je sais mais là franchement, je suis étonné. Singapour niveau foot, c’est soft, y a peu d’intérêts en jeu donc ça m’étonnerait qu’il y ait ce genre de problèmes. La Thaïlande par contre, il y a beaucoup d’argent et d’enjeux, on m’a déjà dit que des matchs étaient arrangés là-bas, des bruits courent…

Tu as déjà été approché à ce sujet ?Moi, non. Enfin… si, sur Facebook. C’était entre mon contrat à Singapour et mon départ pour l’Inde, à une période où je cherchais un club. Un jour, un mec que je connais pas m’a contacté sur Facebook, il disait qu’il voulait me faire signer dans un club, je sais plus où. Le deal, c’était de signer, de jouer, de faire exprès de perdre et en échange, je devais toucher de l’argent. Enfin, j’imagine vu que je n’ai pas cherché à en savoir plus.

Après tout ça, tu gardes foi en ton sport ?Oui, et puis ce sont quand même des expériences enrichissantes. Bien sûr, il y a des galères et je me dis parfois que je serais mieux en National avec mon petit salaire fixe et un appart, mais quand tu commences à voyager… Je parle anglais maintenant, je me suis fait un réseau, je connais des entraîneurs, des agents… Le foot aujourd’hui, c’est du réseau, faut pas se mentir : l’entraîneur connaît l’agent, qui place ses joueurs dans le club de l’entraîneur, c’est comme ça que ça se passe. Je commence à bien maîtriser les rouages, ça pourra me servir pour plus tard.

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