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Amélie Lavèvre : « 0-20 ? Ça aurait pu être pire »
Prendre vingt buts et être désignée meilleure joueuse : la gardienne du Racing Besançon, Amélie Lavèvre, a fait connaissance avec la magie de la coupe. Alors que son équipe s’est fait atomiser 20-0 à domicile par l’Olympique lyonnais en Coupe de France, cette animatrice périscolaire de 19 ans a multiplié les parades exceptionnelles face à ses idoles. De quoi avoir le droit à une toute première interview.
Salut Amélie. Comment as-tu vécu ce match de fou ? Avant la rencontre, j’étais un peu stressée. On avait toutes de l’appréhension. C’était quand même impressionnant de voir les meilleures joueuses d’Europe en face de nous. À mon premier arrêt, les spectateurs se sont tous levés et ont beaucoup applaudi. Forcément, ça met en confiance. J’ai mieux vécu le match après.
Selon L’Est Républicain, tu as été la joueuse du match « sans aucune contestation possible » . Ce n’est pas paradoxal pour une gardienne qui a encaissé vingt buts ?
Pas spécialement ! C’est plus facile de se montrer quand on reçoit beaucoup de frappes. Quand on n’en a aucune, comme la gardienne lyonnaise, c’est tout de suite plus difficile de briller.
Tu savais que ça allait être un match compliqué dès le départ ? On savait que le match était perdu d’avance en quelque sorte. Jouer contre la meilleure équipe d’Europe… Nous, on est avant-dernières de Régional 1 ! On savait qu’on allait perdre, donc j’étais moins stressée. Un match important où ça va être serré, c’est toujours plus stressant. Mais là… Je savais que j’allais prendre un certain nombre de buts. Les arrêts que je faisais après, c’était que du bonus.
On joue à peine la troisième minute et tu encaisses déjà un deuxième but lyonnais. Qu’est-ce qu’il se passe à ce moment-là dans ta tête ? J’espérais qu’on allait quand même être un peu plus agressives pour éviter la catastrophe. 0-20 ? Ça aurait pu être pire. Ça aurait pu être mieux aussi, mais on a donné le maximum. Après, le résultat, on s’en moquait un peu. C’est une lourde défaite, mais elle ne va pas du tout plomber notre moral. On a vraiment pris ce match-là comme une récompense dans notre saison. Le but était de jouer contre nos idoles. C’est déjà une belle victoire d’avoir joué contre elles.
À la mi-temps, vous êtes menées 9-0. Elle était comment la causerie du coach dans les vestiaires ? Il a fait redescendre une joueuse pour qu’on joue à cinq derrière afin d’éviter de se prendre un maximum de buts. Et puis il nous a dit d’être plus fortes dans les duels, d’aller au contact. L’objectif de la deuxième mi-temps était surtout de se prendre moins de buts qu’en première période. Bon bah, c’est loupé. (Rires.)
Tu as même pris un but d’une de tes coéquipières. Ça doit être rageant. Un de plus, un de moins… Ça aurait été le premier but, j’aurais été déçue. Là, c’était le quinzième, donc je ne lui en veux pas. C’était dans le but de dégager le ballon, c’était involontaire. Il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne font jamais d’erreurs.
Tu as tout de même réalisé plusieurs parades monstrueuses qui ont fait parler de toi. Tu penses que c’est un match qui peut lancer ta carrière ?Non, je ne pense pas. Pour l’instant, je suis bien dans mon petit club à jouer le week-end à mon niveau. Mon objectif pour le moment est de remonter au classement en championnat avec le Racing Besançon. Et après, j’aimerais monter en D2 avec ce club.
Malgré ce score fleuve, le public bisontin a été au rendez-vous (près de 4000 spectateurs) jusqu’au coup de sifflet final. Il t’a notamment ovationnée sur chacune de tes interventions. C’est quoi le secret des Bisontins pour toujours voir le bon côté des choses ? Les Bisontins sont des gens déterminés. Comme dit la devise de la Franche-Comté : « Comtois, rends-toi ! Nenni, ma foi ! » Ça signifie qu’il ne faut jamais rien lâcher, quoi qu’il arrive. Donc les supporters bisontins, c’est pareil : ils ne lâchent rien. En tout cas, c’était vraiment un match exceptionnel. D’habitude, on tourne autour de vingt spectateurs. Là, on en avait 4000 ! Il y a un stress supplémentaire, mais ça motive aussi. Ça donne envie de bien faire. Et puis, ça fait toujours plaisir d’entendre son prénom crié dans les tribunes. Même si c’est vrai que ça peut être gênant aussi quand on n’a pas l’habitude. D’autant plus quand on est un petit peu timide comme moi.
Tu as eu des compliments de la part des Lyonnaises après la rencontre ? Hegerberg m’a dit que j’avais fait de belles parades. Camille Abily aussi m’a félicitée à la fin du match. J’ai surtout discuté avec elle et Eugénie Le Sommer. C’est vraiment des superbes joueuses ! Je leur ai demandé en rigolant si elles n’auraient pas pu nous mettre moins de buts. Elles m’ont répondu que si elles n’avaient pas joué à leur niveau, ça aurait été un manque de respect. Elles ont joué à fond pour nous respecter. J’étais d’accord avec elles. Ça n’aurait servi à rien qu’elles se mettent à notre niveau. Nous, ce qu’on veut, c’est du beau jeu. On veut jouer contre les meilleures. Et puis, au moins, elles ont fait plaisir au public qui a vu des buts. C’est le principal.
Il paraît que vous avez dévalisé le vestiaire lyonnais après la rencontre pour garder des souvenirs du match. Qu’est-ce que tu as réussi à récupérer ? La moitié de l’équipe y est allée, au moins. Certaines ont récupéré des crampons ou des maillots. Moi, je n’y suis pas allée. Je ne sais pas trop pourquoi. J’avais encore des étoiles dans les yeux. Je crois que je ne réalisais toujours pas ce qu’il se passait. Mais je ne regrette pas de n’avoir rien récupéré. On a aussi eu le droit à trente minutes après la fin du match pour autographes et photos avec les joueuses. Mais pareil, les photos, je ne suis pas très fan. Je préfère profiter du moment.
On t’a parlé de ton match aujourd’hui à ton travail ? Des enfants sont venus me voir et ils ne m’ont parlé que du match. Il y en a un qui avait quatre ans. Il a raconté que je faisais du foot à tous ses copains. Il m’a dit : « T’es trop forte ! J’ai vu, t’as fait plein d’arrêts ! » Il était limite fan de moi. Ça fait toujours plaisir.
Propos recueillis par Robin Richardot